L'astronaute Thomas Pesquet sera-t-il victime de l’étrange syndrome qui affecte la vision dans l’espace ?

A 38 ans, Thomas Pesquet va s'envoler le 17 novembre 2016 pour 6 mois dans l’espace à bord de la station spatiale internationale.

Dans quelques heures, l'astronaute Thomas Pesquet s’envolera pour 6 mois dans l’espace à bord de la fusée Soyouz. C’est la première fois qu’un Français va rester si longtemps à bord de la station spatiale internationale. Une expérience qui risque d’altérer sa santé visuelle. Sa vision pourrait en effet chuter dans un rapport de 1 à 5 en quelques mois, à l’instar de l’astronaute John Philips, après 6 mois sur la station spatiale internationale en 2005.

 

Des changements oculaires anatomiques

Au total, une douzaine d’astronautes a signalé des détériorations de l’acuité visuelle après leur mission. Des examens échographiques ont révélé que la face postérieure du globe oculaire s’aplatie, le nerf optique gonfle anormalement, la rétine et la choroïde subissent des changements structurels. « Beaucoup de recherches ont été menées pour expliquer pourquoi ces problèmes de vision se produisent, et de nombreuses théories existent, déclare la Nasa. Une théorie postulerait que le déplacement vers le haut du fluide intracrânien dans l'espace provoque une pression sur le nerf optique et la face postérieure de l'œil, entraînant ainsi des changements anatomiques qui affectent la vue ». Ce phénomène, appelé pour le moment déficience visuelle par pression intracrânienne (VIIP), toucherait près de 80% des astronautes.

Des nouvelles techniques de recherche par la Nasa

Mais pour l’instant, la raison de cette baisse de l’acuité visuelle reste un mystère. Pour trouver un remède à cet étrange syndrome, la Nasa tente de mettre au point de nouvelles techniques pour examiner la vision de l’équipage en orbite. « Les mesures invasives de la pression intracrânienne (PCI) n'ont jamais été pratiquées chez un sujet humain dans l'espace, mais une estimation non invasive a récemment été réalisée pour la première fois à bord du laboratoire en orbite », annonce l’agence américaine. Les chercheurs ont besoin de déterminer si la PCI est élevée pour mieux comprendre la cause profonde des problèmes et développer des contre-mesures efficaces ».

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Expédition 47 : Le commandant Tim Kopra de la NASA participe à l'enquête sur la santé oculaire à bord de la Station spatiale internationale.  ©Nasa

 

... mais le mystère reste entier

Les données de la mission d'un an, réalisée en 2015, sont toujours en cours d'analyse, mais les résultats préliminaires suggèrent qu'il n'y a pas d’augmentation importante de la pression intracrânienne pendant le vol spatial. « Il y a certainement une accumulation de liquide céphalorachidien derrière l'œil, mais nous ne comprenons pas ce qui cause la détérioration de l’acuité visuelle, a déclaré le Dr. Michael Stenger, scientifique principal à la Nasa. Une pression veineuse élevée ou un changement dans le drainage lymphatique pourrait séquestrer le liquide derrière l'œil, causant ainsi un syndrome de compartiment », ajoute-t-il.

D'autres dispositifs non invasifs et des techniques utilisant des ultrasons sont utilisés à bord de la station spatiale internationale pour poursuivre les recherches dans ce domaine. L'échographie est utilisée pour scanner le diamètre de la gaine du nerf optique et mesurer l'indice de pulsatilité de l'artère cérébrale moyenne afin de surveiller la pression intracrânienne.

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L'astronaute de la Nasa Michael Hopkins, ingénieur de vol Expedition 37, effectue une imagerie par ultrasons dans le laboratoire Columbus de la Station spatiale internationale. L'astronaute de l'ESA (Agence spatiale européenne), Luca Parmitano, ingénieur de vol, assiste Hopkins. ©Nasa

 

Notre astronaute français sera lui aussi un « cobaye » mais pour des expériences d’un autre genre. Car en réalité, chacun travaille pour des laboratoires de son propre pays, pour faire des études plus poussées. Thomas Pesquet va par exemple faire des expériences pour l’Inserm (l'Institut national de la santé et de la recherche médicale) sur le vieillissement artériel. Si on trouve des solutions pour freiner le vieillissement du corps dans l'espace, on pourra peut-être les appliquer aux personnes âgées, ici, sur Terre.