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carole_riehl_cold_.jpgL’enjeu est considérable, et le projet était risqué. Le 1er Congrès de l’optique lunetterie durable (Cold) à Dourdan en Essonne ce lundi 6 novembre a été porté à bout de bras par Carole Riehl, opticienne aux nombreuses casquettes (Optic for Good, Recycloptics et Cold). Sa détermination d’éclaircir l’opacité de l’impact environnemental de la filière de l’optique-lunetterie est parvenue à rassembler, pour la première fois, les acteurs intéressés par le sujet.

Un succès encourageant

Environ 150 participants ont partagé une journée autour du thème de l’écologie. Cela paraît peu, mais c'est surtout inédit, et tous les participants avec lesquels nous avons pu échanger ont exprimé leur enthousiasme et en reconnaissant le succès du Cold, soulignant la qualité des interventions.

Au programme, une quinzaine d’exposants* (Naoned, Comeback, Ophalmic, MontRoyal, Greenfib, Zac…), et près d’une dizaine de conférences d’une demi-heure chacune. Les discours d’entreprises extérieures à l’optique-lunetterie, allant du conseil RSE au recyclage, ont pu alimenter la réflexion des intervenants de l’optique présents (Hoya, Fnof, Rof, Synom, Verre2Vue) et élargir le champ des échanges tout au long de la journée.

 

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De gauche à droite : Amélie Foulon (Parangone), Isa Bouglime (Hoya), Margaux Bédé (journaliste)

 

Peu de fabricants participants aux conférences

La seule table ronde où des industriels étaient présents rassemblait Hoya Vision Care France et la société Parangone, société qui accompagne le verrier dans sa politique RSE. La question du recyclage des verres optiques reste entière : « On travaille à améliorer la prise en charge des déchets », explique Isa Bouglime, directrice des affaires publiques chez Hoya, « mais créer une filière de recyclage coûte énormément d’argent. Avant de penser à une nouvelle chaine des valeurs, il faut des investissements, et entrainer tous les acteurs, depuis les fabricants jusqu’aux porteurs ». L’union sacrée de la filière est, comme sur d’autres sujets, invoquée.

Le 100% Santé peut-il être écolo ?

Les syndicats d’optique (Fnof, Rof et Synom) se sont partagés ce sujet. Si tout le monde reconnait que le 100% Santé a un impact environnemental néfaste, aucune donnée chiffrée n’est présentée. La journaliste et modératrice Margaux Bédé met les pieds dans le plat : « pourquoi les syndicats ne parlent-ils pas d’écologie ? », demande-t-elle.

 

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De gauche à droite, Margaux Bédé (journaliste), Sandrine Ladoux (Rof), Lucie Redonnet (Synom), Hugues Verdier-Davioud (Fnof)

 

Le Rof, représenté par Sandrine Ladoux (également directrice communication, santé et RSE du groupe Optic 2000), admet volontiers que « c’est vrai, on en parle très peu. Néanmoins, cela prend de l’ampleur, et une commission sur ce sujet a été créée au Rof. C’est une mission de filière qui doit englober tous les acteurs, pas seulement les syndicats. Il y a tout un modèle économique à construire collectivement, et cela va prendre du temps. Il y a des adhérents du Rof qui sont déjà engagés, comme Optic 2000 qui a installé des corners de lunettes de seconde main dans certains magasins ».

Transformer cette économie linéaire

Hugues Verdier-Davioud, président de la Fnof, rappelle que « les produits du panier A sont fabriqués en Asie et leur traçabilité est insuffisante. Les prix imposés sur le panier A ne permettent pas à l’opticien de choisir des montures fabriquées en France. Le modèle économique n’était pas prêt : à 60 euros la monture par exemple, cela entrait en concurrence avec les offres de secondes paires des enseignes. Pourtant lors du dernier comité de suivi du 100% Santé, on nous annonce qu’il faut réfléchir à "favoriser l'économie circulaire par une offre de produits remis en usage". La Fédération a répondu au ministère que cela concerne aussi les fabricants et les distributeurs. Pour que le 100% Santé soit moins néfaste à l’environnement, le modèle économique est à revoir et le risque est de déstabiliser la filière.

Par ailleurs, l'écologie en optique-lunetterie ne se limite pas au panier A. C'est pourquoi nous soutenons l'importance de réaliser une ACV (analyse de cycle de vie) pour savoir comment sont constitués les verres et les montures, en coordination avec l'ensemble des acteurs de la filière. Il faut définir un cadre règlementaire avant de se laisser déborder par des initiatives individuelles qui n'ont souvent qu'un objectif commercial et peuvent conduire à des dérives ».

Trouver l'équilibre entre santé visuelle et écologie

Pour Lucie Redonnet, déléguée générale du Synom, « il faut que la filière porte unie des propositions pour transformer notre modèle de production, de distribution et de recyclage. La santé de nos concitoyens nécessite aussi de porter ces transformations écologiques. C'est précisément ce que de nombreux acteurs innovants et engagés en optique nous offrent désormais comme alternatives ».

Prochain rendez-vous en 2024

D’autres conférences ont eu lieu, comme sur la récente loi Industrie Verte, sur l'importance de l'ACV pour anticiper les risques, sur d'autres filières qui ont pris à bras le corps leur décarbonation, ont permis d’échanger de façon transversale. Cette 1ère édition du Cold ne s’était pas trompée : le sujet environnemental intéresse, et va devenir de plus en plus important, comme dans les autres professions.

La prochaine édition du Cold aura lieu le 4 novembre 2024.

 

*La liste des participants et exposants est en pièce jointe