Alors que la loi Santé doit être débattue en séance publique au Sénat dès le 14 septembre, les premiers amendements au texte commencent à tomber. Et deux parlementaires, Alain Vasselle (Les Républicains) et Olivier Cigolotti (UDI), s’intéressent déjà de près à notre filière de santé visuelle. A travers les amendements 101 et 103, ils demandent à confier l’acte d’adaptation des lentilles de contact aux opticiens et aux orthoptistes « ayant suivis une formation qualifiante de contactologie ».
Ils proposent ainsi d’ajouter à l’article L. 4362-9-1 du Code de la santé publique l’alinéa ainsi rédigé :
« Les opticiens-lunetiers et les orthoptistes ayant suivis une formation qualifiante de contactologie sont habilités à pratiquer l’acte d’adaptation des lentilles oculaires de contact, sous couvert d’une délégation de soins des ophtalmologistes, en dehors des cas de prescriptions médicales que l’assurance maladie prend en charge, tels que prévus à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale. Un décret fixe le niveau de formation attendu en contactologie pour autoriser les opticiens-lunetiers et les orthoptistes à pratiquer cette adaptation. »
Promouvoir la contactologie en France
Les deux sénateurs expliquent leur intention par le fait de vouloir promouvoir la contactologie en France. « Aujourd’hui, environ 5% de la population française porte des lentilles de contact, soit environ 3 millions de personnes. Ce pourcentage est relativement stable depuis plusieurs années. Pour autant, on ne peut dire que les besoins des Français soient satisfaits. En 2014, une étude de l’observatoire Galliléo montrait que 30% des porteurs de lunettes déclaraient être également intéressés par l’utilisation de lentilles de contact », écrit Alain Vasselle pour qui « cette carence s’explique par l’absence d’une qualité suffisante d’adaptation des lentilles oculaires ».
« En France, l’adaptation de lentilles de contact est considérée comme un acte médical réalisé par les ophtalmologistes. Or en pratique, il existe de nombreux cas de délégation officieuse à des professionnels de santé de l’œil : orthoptistes ou opticiens-lunetiers, continue Olivier Cigolotti. La répartition des ophtalmologistes est très inégale sur le territoire, et de nombreuses zones ne sont pas couvertes, ou en carence ».
Alors qu’un « nombre grandissant d’opticiens-lunetiers ont acquis une formation complémentaire en contactologie par le biais d’une licence ou d’un master en sciences de la vision, mais également via d’autres diplômes universitaires », « il est opportun que ces professionnels de santé oculaire puissent offrir une solution adéquate aux besoins des patients qui souhaitent s’équiper de lentilles », s’accordent les deux parlementaires.
Une seule condition : la formation !
Alain Vasselle et Olivier Cigolotti posent cependant une condition : celle de la formation. « La qualification en contactologie de ces professionnels étant un prérequis indispensable. La délégation de l’adaptation des lentilles de contact ne saurait être possible sans la garantie d’une formation qui devra faire l’objet d’une concertation entre les professionnels de la santé visuelle », précisent-ils.
« En outre, l’exclusion du champ de l’adaptation des cas de prescriptions médicales de lentilles de contact que l’Assurance Maladie prend en charge, à savoir l’astigmatisme irrégulier, la myopie égale ou supérieure à 8 dioptries, le strabisme accomodatif, l’aphakie, l’anisométropie à 3 dioptries et le kératocône, permet de n’entraîner aucune surcharge de dépenses. Ces cas particuliers de prescription ne représentent qu’1 à 2% de l’ensemble des actes pratiqués chaque année », poursuit Alain Vasselle.
Ces amendements visent donc à permettre à certains orthoptistes et opticiens-lunetiers qualifiés en contactologie d’assurer, sous couvert d’une délégation de soins de la part des ophtalmologistes, l’adaptation des lentilles oculaires au bénéfice de la santé visuelle de proximité des Français.
D'autres amendements à venir
Et il se pourrait bien que ces deux amendements au projet de loi Santé ne soient que les premiers d'une longue série. Le Gouvernement pourrait lui-même amender le texte alors que l'Inspection générale des Affaires sociales (Igas) a remis son rapport sur l'organisation de notre filière au ministère de la Santé en juillet dernier. Ainsi certaines mesures retenues pourraient rapidement y être introduites.
Dans tous les cas, le texte n’a pas fini son parcours parlementaire et les changements effectués par les sénateurs ne pourraient être que transitoires. Au vu des premiers désaccords entre les deux chambres parlementaires, et dans le cadre d’une procédure accélérée engagée par le Gouvernement, une commission mixte paritaire devra donner son avis sur le texte avant que les députés n'aient finalement le dernier mot lors d'un vote définitif.