Dans le CDF Mag, Thierry Soulié (président du CDF), a réagi à la sanction prononcée par l'Autorité de la concurrence. À retrouver en bas de la News.
Après avoir saisi l’Autorité de la concurrence en 2014, Santéclair a obtenu gain de cause. À l’époque, le réseau de soins avait dénoncé une « stratégie agressive d’intimidation » envers ses chirurgiens-dentistes de la part notamment du Conseil national de l’ordre des chirurgiens‑dentistes (CNOCD), de la Fédération des syndicats dentaires libéraux (FSDL) et des Chirurgiens-dentistes de France (CDF).
4 millions d’euros
En fin de semaine dernière, après 6 ans d’investigations et de confrontations, l’Autorité de la concurrence a donc sanctionné le CNOCD et les 2 fédérations syndicales, ainsi que 5 conseils départementaux de l’ordre des chirurgiens-dentistes (Isère, Bouches‑du‑Rhône, Dordogne, Haut-Rhin et Bas-Rhin).
L’objet de la condamnation : « pratiques de boycott à l’encontre des réseaux de soins (notamment Santéclair, Kalivia, Itélis) proposés par les organismes complémentaires d’Assurance Maladie », et ce entre février 2013 (novembre 2014 pour la CDF) et décembre 2018. Le coût total de la sanction s’élève à 4 millions d’euros.
« Les réseaux concernés visent à faciliter l’accès aux soins »
Selon l’Autorité de la concurrence, ces pratiques visaient à « entraver le fonctionnement » des réseaux et constituaient « une infraction au droit de la concurrence ». Parmi les pièces étudiées au cours de l’instruction : un courrier intitulé « Appel à la résistance contre Santéclair » adressé en 2013 par le président de la FSDL au CA de son syndicat puis largement diffusé, ou encore de nombreux posts sur les réseaux sociaux dont le groupe Facebook « Les chirurgiens-dentistes ne sont pas des pigeons et encore moins des moutons ».
En outre, il a été reproché au CNOCD, le CDOCD de l’Isère et la FSDL d’avoir organisé une campagne pour encourager les chirurgiens‑dentistes à porter plainte contre leurs confrères adhérents à Santéclair devant les conseils départementaux.
L’Autorité de la concurrence ajoute : « Ces pratiques sont d’une particulière gravité dans la mesure où les réseaux concernés visent à faciliter l’accès aux soins des patients en réduisant le montant des dépenses restant à la charge de ces derniers. Or le reste à charge constitue un motif essentiel de renoncement aux soins dentaires. »
Le détail des sanctions financières
Des 4 millions d’euros de sanctions au total, le CNOCD en hérite de la plus grosse partie. Voici la répartition :
- CNOCD : 3 millions d’euros
- CDF : 680 000 euros
- FSDL : 216 000 euros
- CDOCD de l’Isère : 57 000 euros
- CDOCD des Bouches du Rhône : 23 000 euros
- CDOCD du Bas-Rhin : 22 000 euros
- CDOCD du Haut-Rhin : 11 000 euros
- CDOCD de Dordogne : 4 000 euros
La réaction de Thierry Soulié, président du CDF
« Cette condamnation est aussi injuste qu’injustifiée, ce d’autant plus que nous n’avons jamais enfreint la loi en appelant au boycott ! Au contraire, nous pensons qu’il est de notre rôle et même de notre devoir de dénoncer la marchandisation des soins et d’alerter les pouvoirs publics, les patients et les praticiens sur les risques de dérives en matière de qualité de traitements.
Dans un pays où la liberté est inscrite sur le fronton de nos institutions, l’Autorité de la Concurrence bafoue ce droit constitutionnel en empêchant un corps intermédiaire de tenir son rôle de lanceur d’alerte et en réduisant sa liberté d’expression à la portion congrue. En agissant ainsi, l’Autorité se comporte en « juge et partie » et bâillonne le syndicat le plus influent de la profession. En infligeant une sanction financière disproportionnée, d’une ampleur liée à la surface financière des CDF, elle met en danger une institution dont la politique a toujours été de défendre l’accès aux soins des patients.
[…]
Si la liberté de parole et d’action a encore un sens dans ce pays, les CDF doivent être en mesure de tenir ce rôle essentiel d’intermédiaire entre le pouvoir et leurs mandants. Forts de cette légitimité institutionnelle et animés par un sentiment d’injustice, ils formeront donc un recours contre cette décision devant la Cour d’appel de Paris. »