Après avoir interrogé les syndicats (Snof – SNAO) sur les nouvelles compétences des orthoptistes depuis le 7 décembre 2016, acuite.fr a donné la parole aux syndicats d'opticiens. Le décret, paru le 6 décembre au Journal Officiel (JO) introduit la notion de protocole organisationnel pour réduire les délais d'attente en cabinet d'ophtalmologie. Une étape supplémentaire qui vient élargir et assouplir le cadre des délégations de tâches*.
« Ces mesures vont dans le bon sens. Compte tenu de la pénurie d’ophtalmologistes, il faudra néanmoins aller plus loin dans la délégation aussi bien dans notre secteur que celui des orthoptistes. La complémentarité de nos 3 professions est indispensable », explique à acuite.fr Alexandra Duvauchelle, déléguée générale du Synope (Syndicat des opticiens entrepreneurs).
Toutefois, pour le Synope, il aurait été prématuré d’autoriser les orthoptistes à renouveler et adapter les corrections optiques. « La réingénierie du diplôme d’orthoptiste vient juste d’être mise en place. L’acte de réfraction dans le cadre d’un bilan orthoptique n’est pas tout à fait le même que celui d’un renouvellement d’équipement optique, où l’opticien est responsable également de la délivrance des lunettes ». précise-t-elle. « Nous souhaitons que tous les acteurs de la filière œuvrent dans le sens de faciliter l’accès des Français aux soins visuels. Si pour y parvenir, il faut traduire cela par des compétences partagées entre opticiens et orthoptistes, dans un cadre sécurisé et pluridisciplinaire, nous y sommes favorables. Ce décret des orthoptistes comme celui des opticiens est une deuxième étape, mais sûrement pas la dernière. Il va falloir aller plus loin », ajoute Alexandra Duvauchelle.
« Ces premières mesures devraient apporter des améliorations sur les délais de rendez-vous »
De son côté, l’UDO se félicite de toutes les nouvelles qui vont dans le sens de faciliter l’accès aux soins oculaires des Français. « Cet élargissement des actes pour les orthoptistes s’appuie concrètement sur les recommandations du rapport Igas, effectuées par le Dr Voynet, en 2015. D’autres ont été formulées, et nous attendons qu’elles se mettent en place progressivement », fait savoir à acuite.fr Catherine De La Boulaye, présidente de l'UDO. Il s’agit notamment de la refonte de la formation des opticiens lunetiers et l’intégration dans le schéma LMD, avec la création d'une 3e année moins commerciale, comportant une période suffisante de stage clinique, permettant de valider une licence professionnelle. Les étudiants qui le souhaitent, pourraient poursuivre leur formation en master ; soit une universitarisation totale de la formation, « qui permettrait la régulation des effectifs par un examen d'entrée et la fixation d'un numérus clausus ».
« Ces premières mesures devraient apporter des améliorations sur les délais de rendez-vous des cabinets médicaux, il faudra continuer à travailler avec les ophtalmologistes pour garantir l’accès aux soins oculaires partout en France et les opticiens, pourront eux aussi œuvrer dans le cadre d’une filière visuelle réorganisée sous l’autorité du médecin», ajoute-t-elle.
« La filière se met en place progressivement »
Pour Alain Gerbel, président de la Fnof, « ce décret ne fait que codifier les pratiques existantes entre orthoptistes et ophtalmologistes. Il permet de retranscrire dans la loi ce qu'il se fait au quotidien. La filière se met en place progressivement et on constate que pour améliorer l'accès aux soins en ophtalmologie, il faut instaurer un ensemble de mesures : le décret sur les opticiens, celui sur les orthoptistes et il y aura besoin d'autres textes pour appuyer cette volonté. La "Démarche en santé visuelle" que nous avons présenté le 23 septembre dernier, au Silmo 2016 est une première réponse collective de l'ensemble de la filière ».
« Un certain nombre de compétentes pour les orthoptistes ont été clarifiées dans ce décret. Elles étaient déjà évoquées dans le rapport Igas. Ce texte ne fait que confirmer les nouvelles prérogatives », commente à acuite.fr Yannick Dyant, président de l'AOF (l'Association des Optométristes de France). Pour lui, il est néanmoins essentiel que les nouveaux droits des orthoptistes ne limitent pas les pratiques des opticiens. « On constate que les compétences qui ont été attribuées aux orthoptistes semblent exclusives. Or, certaines d'entres elles dont la mesure des hétérophories fait partie des aptitudes des opticiens et de sa formation. Ce point sera à clarifier », fait savoir le président de l'AOF.
En outre, Yannick Dyant estime que les protocoles organisationnels ne vont pas venir à bout des délais d'attente.
*Jusqu’à présent les ophtalmologistes pouvaient mettre en place des protocoles de coopération avec les orthoptistes en faisant appel à l’article 51 de la loi HPST de 2009. Les protocoles devaient alors être déposés auprès des ARS (Agences Régionales de Santé) et validés par la HAS (Haute Autorité de Santé).