Suite à la proposition du Sénat et de la Fédération Nationale de la Mutualité Française (FNMF) de rembourser les lunettes tous les 3 ans au lieu de 2 ans aujourd'hui, le président de la Fédération nationale des opticiens de France (Fnof) a souhaité réagir sur Acuité.

 

hugues_verdier_fnof.jpgHugues Verdier-Davioud : « Le confort visuel, le droit au bien voir n'est pas un luxe. C'est le minimum que chacun d'entre nous peut espérer. C'est un acquis social, un facteur d'intégration en société, au travail. Un élément de sécurité et accessoirement, je dirai même jusqu'à un outil de productivité.

Avec une paire tous les 6 mois, difficile de s'en rendre compte. Mais avec un équipement tous les 3 ans, c'est un véritable choix politique, et arbitrage social.
Concrètement, passer de 2 à 3 ans peut poser des problèmes de santé et être complètement contre-productif en termes de coût de santé publique.

Quels encadrements prévoient-ils ? Les citoyens comprennent qu'ils ne pourront remplacer leur équipement que tous les 3 ans, même si leur correction évolue et c'est bien ce que sera la communication des complémentaires.

Pendant ce temps-là, les cotisations vont continuer d'augmenter. On fait donc prendre en charge aux citoyens le soi-disant déséquilibre financier des complémentaires, à cause, notamment d'une loi dont l'inefficience est reconnue aujourd'hui de tous : le 100% santé, notamment optique, et ce, en pleine crise économique où les citoyens sont en quête de pouvoir d'achat. Les citoyens vont cotiser 50% de plus pour accéder à un équipement dont il faut parier que les montants de prise en charge baisseront au titre des garanties contractuelles ». 

 

Réaction à l'amendement déposé dans le cadre du PLFSS 2025 pour confier aux Ocam la gestion complète du panier B.

 

Hugues Verdier-Davioud : « La proposition d'amendement qui consiste à déléguer aux Ocam la gestion du panier B est tout autant indécente. Elle illustre encore plus le risque d'uberisation du marché et de la prise en charge de la santé visuelle, avec, il faut le prévoir, une augmentation de son coût. Je veux bien travailler avec les Ocam sur des paniers optionnels, mais pas sur le démantèlement de la prise en charge fondamentale de la santé visuelle.

Je rappelle que 96% des contrats sont dits responsables et qu'ils sont encadrés. Alors, sauf à réformer le contrat responsable, je ne vois pas bien comment cet amendement pourrait passer. Tous les ans, il revient sur la table mais en l'espèce, il créerait un précédent en matière de santé publique qui serait inacceptable. 

  • Il faudrait quand même se rendre compte que la charge mentale et administrative qui pèse sur le professionnel par ces contrôles récurrents, pas forcément justifiés, nuit au développement du tiers-payant, et donc, à la fois au patient, mais aussi à l'image des complémentaires. Plus les contrôles se multiplient, plus les opticiens sont tentés de se déconventionner et abandonner le tiers-payant. 
  • Cette solution est aussi un non sens économique. Les ocams veulent faire des contrôles pour, soi-disant, lutter contre la fraude et cela représente, selon eux, 20% de leur coût de gestion. En leur délégant ces contrôles, on ne fera qu'augmenter les coûts de gestion, et donc l'augmentation des cotisations, et ce, sans aucune garantie de résultat. 
  • Avant de confier encore plus de données personnelles à des ocams et/ou leurs réseaux, il va falloir s'assurer de la parfaite sécurisation des flux. Je rappelle qu'en janvier, plus de 30 millions de fichiers ont été piratés sur seulement 2 organismes de tiers-payant. Aujourd'hui, soit 9 mois plus tard, l'un d'eux fonctionne toujours de façon erratique. Il est illusoire de vouloir leur confier toujours plus de donner sans gage de sécurité sur la minimisation des données collectées, et l'usage de mesure de sécurité telles que du hachage cryptographique. 
  • Je signale à ce député que s'il s'agit de contrôle, je suis à sa disposition pour lui présenter le système de traçabilité et de conformité que la filière a mis en oeuvre et qui permet, aux Ocam, de faire le travail à un coût bien plus faible, bien plus rapide, et bien plus efficace que sa proposition. A moins que la disposition des codes fins n'ait d'autres visées que celles affichées politiquement. Parmi l'ensemble des questions orales, écrites, à l'ensemble du parlement, je m'étonne de ne pas avoir vu passer la sienne. Médecin lui-même, il aurait dû être sensible à l'alerte de la Fédération en avril 2024, au fait que des données de santé ont été piratées en janvier. Il n'est pas trop tard, les questions ont repris depuis la rentrée. C'est presque 10 questions en 6 semaines !

Et si nous nous remettions autour de la table ? Et si nous discutions d'une meilleure façon d'appréhender la santé visuelle des français ? Je veux croire que si les pouvoirs publics éloignent les délais d'une année, c'est pour alléger les carnets de rendez-vous des ophtalmologistes sur des actes "secondaires" et qu'ils puissent se concentrer sur leur coeur de métier qui est la pathologie et pour s'appuyer un peu plus sur les opticiens ».