Responsable de nombreux incidents, la non-observance des règles d'hygiène des lentilles et de leurs solutions d'entretien se combat par les nouvelles technologies mais surtout par une bonne information du porteur. Et vous avez aussi votre rôle à jouer ! Le Dr. Sylvie Berthemy revient sur la responsabilité partagée entre ophtalmologistes et opticiens.
Quelle est votre approche pour l'entretien des lentilles de contact ?
Dès les essais faits au cabinet, nous posons les lentilles en respectant toutes les règles d’hygiène : le lavage des mains et le retrait de la lentille de son blister en précisant ce qu’il faudra faire lorsqu’elle sera dans son étui, c’est-à-dire le vider et le laisser sec dans la journée. Ensuite, lorsque nous revoyons le patient dans la journée, se relaver les mains, retirer la lentille et l’insérer dans son étui avec le produit neuf. Nous l’informons qu’il est utile de renouveler son étui le plus souvent possible pour éliminer le risque infectieux par des agents enfouis dans le biofilm qui recouvre les parois et/ou les ergots. Enfin, lors des renouvellements, nous assistons aux manipulations du patient afin de bien vérifier la qualité de ses gestes. Il n’est pas surprenant de les voir oublier de se laver les mains par exemple ! Nous vérifions aussi quelques détails importants donnés lors des premiers essais : massage des lentilles, fermeture du flacon après utilisation...
Dans ce domaine, la responsabilité est-elle partagée entre opticiens et ophtalmologistes ?
La réponse est sans aucun doute : oui ! Elle est engagée d’une part sur les caractéristiques des produits utilisés et leur composition et d’autre part sur les éventuelles contre-indications de certains agents en fonction du matériau (oxydants et certains silico-hydrogels). Il s’agit des critères normatifs d’efficacité des solutions (Stand Alone test et Regimen test). A charge de l’ophtalmologiste de choisir le produit d’entretien en fonction :
- de l’âge du patient car par exemple pour les enfants il faut préférer les oxydants ;
- du terrain local (allergies, traitements par collyre...) ;
- de son environnement ;
- de l’encrassement des lentilles et/ou de la présence de dépôts (nettoyants enzymatiques, renouvellement plus fréquent, changement de matériau…) ;
- de l’aspect de l’œil du patient au retrait de la lentille 3 heures après la pose ;
- et enfin de ses plaintes (inconfort, hyperhémie, staining...).
Il est impératif que l’ophtalmologiste note le produit d’entretien sur l’ordonnance prescrite et l’opticien doit absolument faire abstraction du côté commercial de sa vente pour respecter la prescription.
Quelle valeur ajoutée l’opticien peut-il apporter au patient ?
En cas de conseil, l’opticien doit connaître les composants et la nature des produits d’entretien pour lentilles, voire appeler l’ophtalmologiste prescripteur. Il doit aussi exiger de ses porteurs que des visites ophtalmologiques régulières soient effectuées. Il lui faut vérifier, lui aussi, l’observance des règles précitées et en rappeler les principes. Il est important que nous ayons le même discours afin de ne pas conforter le patient dans le fait que la simplicité du port est corrélée avec la simplification de l’entretien. Si la coopération est impérative entre nos deux spécialités, c’est pour éviter cette banalisation du port de lentilles qui conduit à un relâchement certain avec conduites à risques, achat sur Internet et finalement abandon des lentilles par complications liées au mésusage des règles strictes d’entretien et de surveillance.