Le passage en force du ministère de la Santé pour autoriser l'utilisation de l'Avastin dans le traitement de la DMLA n’aurait-il servi à rien ? C'est en tout cas ce qui ressort du rapport annuel de la Cnam (Caisse nationale d'assurance Maladie). Cette dernière y stipule que « neuf mois après son instauration, la RTU Avastin n'est à ce jour que très peu utilisée, malgré les données rassurantes disponibles ».
Pour mémoire, à l'issue d'un bras de fer entre le laboratoire Roche et les autorités de santé françaises, l’utilisation de l’Avastin dans le cadre de la DMLA est autorisée depuis le 1er septembre 2015, pour une durée de trois ans. Cette autorisation n'est valable que pour le traitement de la forme humide de la maladie oculaire, une aggravation de la forme sèche. Mais selon le professeur Laurent Kodjikian, chef de service adjoint aux Hospices de Lyon interrogé par Le Parisien, « au 30 avril dernier, sur 600 injections pratiquées, une seule contient de l'Avastin. C'est peu, c'est vrai ».
Alors qu'est-ce qui empêche les professionnels d'y avoir recours ? Pour la Cnam, « les leviers à mobiliser concernent à la fois les conditions pratiques de son utilisation, mais aussi l'adhésion des prescripteurs ». La recommandation temporaire d'utilisation (RTU) « précise que le recours à ce médicament doit être indispensable », continue le professeur Laurent Kodjikian, auteur de l'étude Gefal sur les effets bénéfiques de l'Avastin contre la DMLA. Or, il existe deux autres spécialités, le Lucentis et l'Eylea. « Comment expliquer au juge notre choix en cas de problème grave ? Il faut sécuriser juridiquement le recours à ce produit », insiste le spécialiste auprès de nos confrères.
Par ailleurs, les précautions médicales imposées seraient « floues » et « trop contraignantes ». « Pour préparer les seringues, un appareillage aseptisant est nécessaire. Il coûte 100 000€ et devait être réservé exclusivement à l'Avastin !, souligne Le Parisien. Enfin, l'Avastin n'est disponible qu'à l'hôpital, où il nécessite une hospitalisation, alors que 80 % des cas de DMLA sont traités par la médecine de ville...».
Au Journal officiel du 10 mai, un arrêté a dévoilé le nouveau prix de l’Avastin du laboratoire Roche, dans le cadre du traitement de DMLA. Il est passé de 10 à 100 euros. En dépit de cette hausse, il reste beaucoup moins cher que le Lucentis fixé à 738,69 euros par injection. Ce dernier est d'ailleurs le 4e médicament le plus remboursé par l'Assurance maladie : 318,3 millions d'euros en 2014. « C'est dire l'enjeu économique », conclut Le Parisien.