La semaine dernière, la Commission européenne a autorisé le rachat de GrandVision par EssilorLuxottica, après des mois d’enquête. Le géant de l’optique va devoir se séparer de magasins en Italie, aux Pays-Bas et en Belgique, mais pas en France.
Nicolas Sériès, président de Zeiss France, et Jean-Michel Lambert, président de Hoya Vision Care France, nous donnent leur sentiment sur cette décision de la Commission européenne et les conséquences de cette acquisition sur le marché optique. Nous avons également contacté Ophtalmic, Optiswiss et Rodenstock, qui n’ont pas souhaité s’exprimer.
Nicolas Sériès, président de Zeiss France : « EssilorLuxottica devient le principal concurrent de ses clients »
« Pour moi cette décision n’est pas une surprise. Essilor, qui est déjà passé sous pavillon italien, entre désormais dans la distribution et devient le principal concurrent de ses clients. Les opticiens voient leur fournisseur devenir leur propre concurrent en face de leur propre magasin. EssilorLuxottica fabrique verres et montures et distribue, avec un énorme réseau dans le monde entier. Il est totalement autonome par rapport à ses propres clients.
J’imagine que, suite à cette acquisition, certains vont suivre le mouvement. Mais d’autres vont vouloir être indépendants par rapport à tout cela. Nous allons travailler avec ces opticiens-là qui ne voudront pas se retrouver dans les fourches caudines de ce mastodonte. Je vois cela comme une belle perspective, une opportunité de renforcer nos liens avec les opticiens. Car notre stratégie est totalement différente : nous créons des partenariats avec nos clients et nous faisons tout pour leur donner les moyens de réussir sur leur marché. On ne vient pas les concurrencer. Leur succès est notre succès. »
Jean-Michel Lambert, président de Hoya Vision Care France : « Étonnant que la Commission européenne n’ait pas pris de mesure pour la France »
« D’un côté, cette décision n’est pas surprenante : il y a une volonté claire de la part de Leonardo Del Vecchio d’avoir un groupe à la fois industriel et de distribution. Je suis en revanche plus surpris du non-ajustement du marché français en termes de distribution. Essilor détient déjà plus de 60% du marché, et vous y ajoutez les 12% que représentent Général d’Optique et GrandOptical en France… C’en est presque monopolistique. C’est donc étonnant que la Commission européenne n’ait pas pris de mesure pour la France. Mais nous prenons acte de cette décision.
Il va y avoir des changements de positions, mais il faut laisser chaque opticien et chaque chaîne se repositionner par rapport à ce nouvel ensemble qui va se former. Il y aura sans doute des mouvements de partenariats, de parts de marché… »