Suite de nos interviews... Alors que 2013 a été dense en mesures législatives et que notre secteur a été touché de plein fouet par la crise, nous sommes allés à la rencontre des acteurs majeurs de notre profession. Comment ont-ils réagi à cette vague parlementaire ? Comment voient-ils l'année à venir, avec angoisse ou optimisme ? Que vont-ils mettre en place ? Acuité a posé la question à Marcel Cézar (Acuitis), François-Xavier Jombart (Hans Anders) et Gilles Meridjen (Optical Discount).
Marcel Cézar, responsable franchise Acuitis
« Il est très difficile aujourd'hui de faire une critique sans connaître les décrets d'application des différentes mesures législatives adoptées. Selon la manière dont ils seront rédigés, on pourra s'attendre à différentes conséquences. En tout cas, la maximisation des remboursements dans le cadre du PLFSS 2014 va d'abord profiter aux Ocam qui vont pouvoir vendre des sur-complémentaires et appauvrir l'offre faite aux consommateurs. Ces derniers feront les frais des turpitudes des parlementaires. Concernant la loi Hamon, c'est pour moi un non événement.
2013 a déjà été une année très perturbée et on a vu deux choses : le CA moyen par opticien passer sous la barre des 500 000 euros et, pour la première fois depuis que je suis dans l'optique, un CA global en croissance négative. Donc que sera 2014 ? L'année devrait se situer dans la continuité. Je ne m'attends pas à une correction positive tant qu'il n'y a pas de reprise économique globale. S'il va y avoir un certain nombre de fermetures de magasins cette année, le phénomène risque de s'étaler sur 4 à 5 ans. Il est plus que certain que le dénigrement de la profession ne nous a pas fait du bien. Les porteurs nous en parlent. C'est la première fois que j'entends des gens dire qu'ils ne paieront pas 20 euros de reste à charge car les opticiens gagnent trop d'argent ».
François-Xavier Jombart, DG de Hans Anders France
« Hans Anders est favorable au développement des relations avec les Ocam avec pour objectif l'assainissement des pratiques douteuses de quelques-uns et une baisse du reste à charge pour le consommateur. Accorder le remboursement différencié aux mutuelles est pour nous un alignement naturel des conditions de concurrence des différents acteurs sur ce marché. Toutefois, d'autoriser les réseaux fermés pour les seuls opticiens nous interroge sur un point : la pertinence de sortir l'optique des professions de santé. En effet, nous partageons le constat que les lunettes sont trop chères en France mais l'e-commerce n'est pas l'unique solution pour faire baisser les prix des équipements. On se demande par quel miracle Benoît Hamon va atteindre les 1,3 milliard d'euros d'économies quand on sait que l'e-commerce développé aux USA représente à peine 10% du business.
Le marché 2014 pour nous va s'établir sur quatre points :
- Une stabilité ou une récession.
- Un ralentissement du solde net des ouvertures.
- Seuls les opticiens qui auront un positionnement bien différencié, prix bas ou créateur, auront une croissance soutenue. En opposition, tous les généralistes, qui font la même chose, vont souffrir.
- Une redistribution des cartes avec le renouvellement des appels d'offres réseaux (lire notre news du 28/01/2014).
On constate que c'est la meilleure période aujourd'hui pour les magasins qui participent à la réduction du prix des lunettes et du reste à charge pour le client ».
Gilles Meridjen, DG d'Optical Discount
« Nous avions averti nos franchisés des mutations à venir. Pour les réseaux, nous leur avons demandé de se mettre aux normes, car finalement nous n'avons pas vraiment le choix. Si ça peut être perçu comme une atteinte à nos libertés, c'est malheureusement l'avenir de la profession. Notre objectif sur les 2/3 ans à venir est de proposer à nos adhérents des agréments mutuelles et leur faciliter la vie concernant les appels d'offres afin de mettre un maximum de chance de leur côté. L'avenir du chiffre d'affaires d'un opticien passera forcément par les réseaux de soins. Si nous devons bien définir la profession d'hier, c'est un métier d'enfants gâtés avec un système poussé par les Ocam. Aujourd'hui, c'est une réglementation plus stricte. Toutefois, nous pensons que l'attitude des complémentaire va aboutir à une baisse de qualité des produits. Ce qui va tirer la profession vers le bas, au détriment des porteurs.
Globalement, il ne nous semble pas nécessaire de faire baisser les prix des équipements optiques alors que notre enseigne propose toutes les gammes de prix afin de ne pas imposer de reste à charge aux clients. Cet état d'esprit et cet acharnement médiatique est faux et a donné une image déplorable de la profession. Nous avons réussi malgré cela à maintenir notre chiffre d'affaires. Mais la crise va se conclure par une baisse du CA et des fermetures de magasins. Tout cela dû à l'association de trois choses : la crise économique qui touche tous les commerces, additionnée à un effet de multiplication des points de vente et la cerise sur le gâteau venant des Ocam qui ont décidé d'intervenir sur le marché. Il faut être vigilant aux mois et aux deux années à venir ».
Profession