Le Parlement a adopté en janvier et février un texte de loi visant à encadrer les centres de santé dentaires et ophtalmologiques, leur imposant l'obtention d'un agrément délivré par les Agences Régionales de Santé, obligeant la constitution de comité de suivi, augmentant sensiblement le montant des amendes et astreintes journalières en cas de fraude, la création d'un registre national des fraudeurs et encore d'autres mesures contraignantes dont vous pouvez trouver le détail ici.
Thierry Bour, président du syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF), se félicite de cette avancée et nous lui avons proposé de réagir sur Acuite.
Acuite : Ces mesures d’encadrement sont-elles satisfaisantes ?
Thierry Bour : C’est un dispositif que nous souhaitons depuis longtemps. Il y a de nombreux cas de centres en infraction qui ont coûté cher aux comptes publics et porté préjudice à de nombreux patients. Les pouvoirs publics en ont largement conscience : c’est pour cela que le texte a été voté à l’unanimité. Députés, sénateurs et gouvernement étaient sur la même longueur d’ondes. J’ai rarement vu une loi aussi consensuelle, c’est le signe qu’il y avait urgence à agir.
Acuite : Cette loi va-t-elle suffire à lutter contre la fraude des centres de santé ?
TB : Le gouvernement pense qu’elle va renforcer leur côté vertueux en éliminant les principaux fraudeurs. Pourtant personne ne peut vraiment dire si ces dérives, qui seront maintenant mieux contrôlées, seront suffisamment contenues. On peut redouter un transfert de la fraude vers d’autres spécialités médicales, comme dans des centres de santé en médecine générale, en pédiatrie, en gynécologie, en dermatologie…
AC : Alors pourquoi seuls les centres de santé dentaire et ophtalmologiques sont concernés par cette loi et non l’ensemble des spécialités médicales ?
TB : Les autres spécialités n’ont pas fait l’objet d’autant de remontées négatives que le dentaire et l’ophtalmologie, et n’ont donc pas attiré l’attention du législateur. Mais surtout, les ARS vont être très sollicitées par cette nouvelle loi puisqu’elle les place au cœur du dispositif de prévention et de contrôle des centres de santé. Lorsque la loi sera promulguée, toutes les ARS vont devoir traiter les demandes d’agréments et assurer leurs nouvelles compétences. On compte 2 400 centres de santé en France aujourd’hui et 38 000 professionnels de santé qui y travaillent, cela représenterait un travail titanesque pour les ARS à qui il va falloir, de toute façon, renforcer les moyens humains et matériel.
AC : Quand la loi sera-t-elle promulguée ?
Etant donné le consensus autour de ce texte, sa 2e lecture au Parlement ne devrait être qu’une formalité et on peut espérer qu’elle soit entérinée d’ici la fin du mois de mars. La plupart des articles vont nécessiter des décrets : l’ensemble de la loi pourrait entrer en vigueur d’ici la fin de l’année 2023, au mieux.