Alors que l’appel à candidature du réseau Kalixia Optique auprès des opticiens* s’achève dans quelques jours le 29 juin, nous avons voulu vous donner la parole sur ce sujet qui ne laisse personne indifférent.
Pierre a ouvert son magasin franchisé il y a 4 ans, dans une grande ville de l’ouest de la France. Il a 3 opticiens dans son équipe, ainsi qu’1 audioprothésiste. « Grâce à ce réseau de soins, nous avons pu valider beaucoup plus de devis, les prises en charge sont traitées directement, ce qui valorise mon magasin et permet de me démarquer par rapport à la concurrence dans le centre-ville », explique Pierre. « Il faut dire qu’adhérer au réseau Kalixia est presque inévitable pour mon magasin au regard de la forte proportion de clients qui y sont rattachés : 35% de ma clientèle dépendent du réseau Kalixia. À l’occasion du nouvel appel à candidature actuellement en cours, j’avais bon espoir que les prix des verres allaient être revalorisés : c’est en fait tout l’inverse. Étant donné le chiffre d’affaires que le réseau représente pour mon magasin, j’ai tout de même décidé de renouveler le contrat avec Kalixia ».
Pression sur les produits de qualité
« Il est difficile d’évaluer quelle serait ma perte de CA en quittant le réseau, mais ce qui est sûr c’est qu’on en perdra aussi en y restant : si les prix des unifocaux sphériques n’ont pas beaucoup évolué, c’est une autre histoire sur les progressifs haut de gamme, avec une diminution d’environ 10% sur les gammes qu’on vendait le plus. Il va falloir s’adapter et jongler pour trouver le meilleur ratio qualité/marge, réduisant notre latitude à privilégier au mieux les besoins du client avant de nous occuper de notre CA. La logique des réseaux veut que nous ne proposions pas les dernières innovations de verres, ce qui réduit nos marges mais aussi la diversité et la qualité de ce que nous pourrions proposer aux clients ».
Silvain Bourgeois est opticien Générale d’Optique à Drumettaz-Clarafond en Savoie, près d’Aix-les-Bains. Pendant des années, il a travaillé avec 90% de réseaux de soins. « Lorsqu’ils sont arrivés sur le marché, les prix qu’ils proposaient étaient tout à fait acceptables », se souvient-il. « La promesse d’augmenter les volumes de vente était une réalité. Mais au fur et à mesure, les critères sont devenus de plus en plus exigeants : d’abord il fallait un certain nombre de diplômés en magasin, puis avoir une activité d’aides auditives, puis être agréé Afnor, puis avoir une salle d’examen de vue d’une superficie précise, puis acheter un certain nombre de montures…ce qui était une aubaine est devenue une véritable contrainte. Mais surtout, je ne pouvais plus du tout proposer l’équipement le plus adapté à mon client : c’était sa mutuelle qui décidait à sa place, et à ma place. Tout était prévu par les mutuelles pour rembourser le moins possible et pour que les produits d’entrée de gamme soit le plus rentable possible pour l’opticien. Pour moi c’était inacceptable, je ne faisais plus mon métier, et en 2015 je suis totalement sorti des réseaux ».
Zéro réseau, 100% Santé
« Comme tous les opticiens sous réseau, j’ai d’abord pensé qu’en les quittant j’allais perdre beaucoup de clientèle. Ça n’a pas du tout été le cas. C’est le professionnalisme, le talent de savoir accueillir, l’intérêt porté aux besoins de nos clients qui font le succès d’un magasin ».
« Il ne faut pas oublier que la présence des réseaux était justifiée par l’accès aux soins pour tous. En réalité, avant leur arrivée, les prix bas existaient déjà en optique : chez Générale d’Optique nous proposions déjà des offres pour les bénéficiaires de la CMU à moins de 60 euros, monture + verre. Et aujourd’hui, le 100% Santé favorise l’accès aux soins, alors que les réseaux participent à la pression économique sur les opticiens qui subissent déjà la hausse des prix des montures, des verres, de la masse salariale…et la diminution des remboursements. Le seul avantage qu’offrent encore les réseaux c’est le tiers payant. Le même tiers payant qui aurait du être obligatoire dans la réforme 100% Santé mais qui n’a toujours pas été appliqué. Il ne faut pas perdre de vue qu’on a toujours le choix de signer ou non, ce n’est pas une fatalité. Un opticien qui fait bien son travail aura toujours des clients ».
*Nous aurions aimé vous proposer davantage de profils, comme par exemple un opticien jusque-là non Kalixia et qui rejoint le réseau cette année.
Et il est évident par ces témoignages que le mécanisme des réseaux est piégeur. Car si on se crée une clientèle qui vient surtout parce qu'on est dans un réseau, et bien si on abandonne le réseau on perd la raison principale pour laquelle les gens viennent dans notre magasin. D'où la peur que suscite l'idée d'abandonner le réseau ensuite. Le piège se referme.
Et c'est de là que vient tout le problème Pierre. Vous dites que les réseaux c'est votre avantage concurrentiel. Cela signifie que vous vous reposez sur le réseau pour vous différencier et que votre magasin n'a pas vraiment grand chose d'autre à offrir. Alors que la différenciation devrait venir de votre manière de pratiquer votre métier. Faire des offres attractives, proposer des produits différents, optimiser le parcours client, l'expérience d'achat, le relationnel, etc. Il existe une multitude de façons de se différencier. En choisissant uniquement les réseaux fermés pour le faire, vous laissez le réseau maitriser, voire posséder votre magasin. Vous êtes soumis à leur bon vouloir. Vous êtes entièrement dépendant d'eux. Et si demain (comme ça commence aujourd'hui), le réseau vous demande de baisser encore vos marges vous serez obligé de le faire. Vous êtes donc totalement soumis à leur volonté, vous devenez presque leur employé, leur exécutant.
Alors que si vous vous différenciez en vous appuyant sur vos propres forces vous aurez une clientèle fidèle qui viendra pour vous et ainsi une vraie liberté d'action. Alors que là vous continuez, pas parce que vous êtes satisfait des conditions, mais surtout parce que vous n'avez pas le choix. Parce que si 35% de votre clientèle dépend du réseau Kalixia c'est parce que vous faites le réseau Kalixia justement. Sinon la proportion serait pas aussi forte.
Moi j'ai une clientèle Kalixia forte aussi mais je fais le tiers payant hors réseau. Je passe par Viamédis, Oxantis et c'est bon. Connaitre leur remboursement avant d'acheter les lunettes et avoir le tiers payant c'est ce qui intéresse le plus les gens au final. Et mine de rien j'ai pas mal de clients qui n'ont pas besoin que je sois Kalixia car leurs remboursements hors réseau sont suffisants. Si on fait une bonne proposition d'offre avec le bon verre ça passe sans soucis. Seuls ceux obsédés par l'idée d'avoir une remise choisiront le réseau et ne se satisferont pas du tiers payant donc c'est pas tout le monde.
Autre détail intéressant, Pierre dit qu'être Kalixia permet de jouer des coudes avec la concurrence en se différenciant. Ca veut dire quoi ? Que la concurrence ne fait pas Kalixia du coup (sinon c'est pas différenciant). Et pourtant la concurrence est bien là non ? Bien installée non ? Donc c'est la preuve que ça marche sans Kalixia aussi.
Après à chacun de voir s'il veut être une usine ou un professionnel, faire du personnalisé et de la qualité ou du volume, vendre sa liberté contre un chiffre d'affaires plus élevé et en donc meilleur en théorie (en ne prenant pas en compte le taux de marge de chaque vente), ou garder sa liberté au risque d'avoir un chiffre d'affaires plus bas mais avec une meilleure marge sur chaque vente.
Perso je suis persuadé que si on devait faire les comptes à la fin, ce que les réseaux apportent en plus en chiffre d'affaires, ils le font perdre en marge finale. Car si on doit pratiquer des prix 30% plus bas alors il faut obligatoirement faire 30% de chiffre d'affaires en plus JUSTE pour avoir LE MEME résultat Pierre. Combien de devis avez-vous pu convertir en plus ? Combien de chiffre d'affaires avez-vous obtenu en plus avec Kalixia ? Si la réponse à cette question est inférieure ou égale à 35% de chiffres d'affaires en plus alors vous êtes un pigeon. Vous travaillez plus pour gagner moins. Vous sacrifiez votre liberté pour rien. Car si votre chiffre a augmenté de moins de 35% alors que vous devez vendre vos montures 15-20% moins chères et vos verres entre 30 et 40% moins chers et bien le chiffre d'affaires généré en plus s'annule et vous fait parvenir au même résultat pour plus de travail. Vous vous faites arnaquer au final.
Et oui, si on fait un chiffre d'affaires de 800 000 euros avec 90 000 euros de bénéfice à la fin ou bien un chiffre de 400 000 avec 85 000 euros de bénéfice à la fin bah y'a pas photo. Perso je choisis les 400 000 euros de chiffre. Car j'aurais moins travaillé pour quasiment le même résultat, j'aurais fait beaucoup plus de qualité, mes clients seront plus satisfaits, j'aurais plus d'estime de moi même et de satisfaction professionnelle, et je serai libre ! Pour moi y'a pas photo, c'est tout bénef.
Et je parle en tant qu'indépendant. Je n'ai pas une enseigne comme Pierre qui lui assure une base de chiffre d'affaires importante. Et franchement, avoir une enseigne qui réclame un pourcentage du chiffre pour la notoriété de l'enseigne et la publicité, tout ça pour au final ne pas s'appuyer sur l'enseigne et sa notoriété mais plutôt sur le réseau fermé, je vois vraiment pas l'intérêt. Vous payez une commission sur le chiffre d'affaires et un droit d'entrée pour avoir une enseigne et vous vous appuyez sur Kalixia pour avoir une clientèle. Ca n'a pas vraiment de sens non ? Vous perdez sur tous les plans ça veut dire. Vous payez une enseigne mais c'est le réseau qui vous fait votre clientèle. Donc vous perdez en payant l'enseigne alors que c'est pas elle qui vous rapporte, et vous perdez en faisant le réseau fermé où vous devez travailler 2 fois plus pour parvenir au même résultat.
Bon je crois que tout le monde aura saisi mon point de vue. Abandonnez les réseaux de soins. C'est inutile. Faites un magasin attractif, ayez un bon contact clientèle, proposez le tiers payant pour que vos clients connaissent leur remboursement et leur reste à charge, et roulez jeunesse. Vous y gagnerez aussi bien à court terme qu'à long terme.
35% de ta clientèle ... pour quel résultat net ? des clopinettes, car une fois tout payé, il ne reste rien ...
On comprend mieux la collusion entre gouvernement et lobby mutualiste et leur faciliter à faire passer des lois en leurs faveurs.