La Haute Autorité de Santé publie aujourd'hui ses recommandations relatives aux lieux et aux conditions d’environnement propice à la réalisation d’une téléconsultation.
Très attendue par les acteurs de la santé, ce rapport vient compléter le référentiel de bonnes pratiques professionnelles relatives à la téléconsultation, publié début janvier.
29 acteurs (professionnels de santé, associations de patients, industriels et sociétés de la télésanté, institutionnels, etc.) ont contribué à l'élaboration de ces recommandations. Questionnaires, visites sur le terrain et consultation publique (qui s’est déroulée du 8 au 22 janvier 2024) ont permis de remonter les informations à la HAS.
Dans le secteur de la santé visuelle, notons la participation du Conseil national professionnel d'ophtalmologie, le Conseil national professionnel des orthoptistes et la Fédération nationale des opticiens de France (Fnof).
Recommandation 1
En réponse à la question « Où installer une cabine ou une borne de téléconsultation ? », la HAS recommande de privilégier les lieux de soins dans lesquels exerce un professionnel de santé.
Les lieux suivants ont été cités par les parties prenantes pour illustrer cette catégorie de lieux : pharmacie d’officine, pharmacie à usage intérieur, laboratoire de biologie médicale, cabinet médical, cabinet paramédical, maison de santé, centre de santé, établissement de santé, établissement médico-social, magasins d’optique. Ces lieux peuvent donner accès à des cabines, consoles, bornes ou autre équipement de téléconsultation.
Cela rejoint la déclaration récente du directeur général de la Cnam, Thomas Fatôme. Certaines parties prenantes ont exprimé qu'ils étaient opposés à la présence de cabines dans des restaurants, des bars, des supermarchés, des centres commerciaux et des gares, et ont réclamé que des interdictions législatives et règlementaires soient mises en œuvre. La HAS estime que le lieu dédié à la téléconsultation ne doit pas être directement accessible depuis l’espace public.
Dans le cas où l’équipement de téléconsultation est implanté dans un lieu de soins
Dans le cadre d’une téléconsultation assistée, un professionnel de santé peut être présent auprès du patient et assister le professionnel médical au cours de la téléconsultation, dans la limite de ses compétences propres. Cet accompagnement est conditionné au consentement préalable du patient.
Dans le cas où l’équipement de télésanté est implanté dans des locaux commerciaux de professionnels de santé
Les professionnels de santé y exerçant doivent être particulièrement vigilants à ne pas se placer en situation de compérage. De plus, un affichage clair et visible doit rappeler au patient son droit à choisir son professionnel de santé.
Dans le cas où l’équipement de télésanté est implanté dans tout autre lieu
Une zone d’attente dédiée doit permettre d’accueillir le patient avant qu’il ne puisse accéder à l’espace prévu pour la téléconsultation ou le télésoin. Cette zone d’attente doit respecter les règles de communication applicables aux professions de santé et être exempte de toute sollicitation commerciale.
Recommandation 2
L’exploitant doit assurer le bon fonctionnement de l’équipement de télésanté. La personne qui exploite l’équipement de télésanté sur le lieu d’implantation est responsable de sa gestion et de son bon fonctionnement.
Recommandation 3
Dans tout lieu d’implantation d’un équipement de télésanté, une personne responsable doit être présente et disponible pendant toute la plage d’ouverture de cet équipement.
Cette personne doit être formée notamment au secret médical, aux droits des patients, à l'utilisation du matériel, à l'entretien des lieux mais aussi à s'assurer de la maintenance du matériel.
L'ophtalmologie, un cas à part
Toutes les particularités liées aux différentes professions ne sont pas détaillées dans le rapport. L’objectif de la HAS est d’élaborer des recommandations génériques qui s’appliqueront à l’ensemble des téléconsultations et activités de télésoin. Néanmoins, la HAS encourage chaque profession à s’emparer de ces recommandations afin de les compléter pour prendre en compte ses besoins spécifiques.
Parmi les 29 parties prenantes à cette consultation, 12 ont proposé d’exclure les lieux à vocation commerciale des lieux possibles pour réaliser une téléconsultation ou un télésoin.
Concernant cette typologie de lieux où exerce un professionnel de santé, 3 parties prenantes ont suggéré de distinguer les lieux où sont délivrés des médicaments ou des produits de santé des autres lieux, cela pour des raisons liées au respect de la déontologie des professions de santé et à la prévention des risques de compérage (par la vente d’un produit de santé délivré sur la base d’une prescription obtenue via la téléconsultation dans ses locaux).
Certains ordres professionnels considèrent que le professionnel de santé ne peut pas prendre en charge un patient se situant dans un local commercial et dans tout local où sont mis en vente des produits de santé.
Un point de vigilance a été formulé au sujet de la téléconsultation en ophtalmologie
Cette dernière nécessite des équipements, très coûteux, semblables à ceux présents dans les cabinets d’ophtalmologie. En l’absence de règlementation, les équipements ont été installés dans des lieux divers : sites secondaires de cabinet d’ophtalmologie avec assistance d’un orthoptiste salarié, cabinets d’orthoptie libéraux, magasins d’optique, maisons de santé pluriprofessionnelles ; des équipements ont même été installés dans des supermarchés. La mise en place d’un encadrement a été proposée afin de limiter les risques de dérives du type : prescriptions abusives, compérage, détournement de patientèle, utilisation du matériel par des personnes non qualifiées, détournement du patient de son parcours de soins, etc. Des points qui rejoignent la recommandation 1.
Mise en contexte
Dans son rapport charges et produits pour 2024, l’Assurance maladie rapporte les chiffres suivants pour le nombre de téléconsultations réalisées :
- 80 000 en 2019
- 13,6 millions en 2020
- 9 millions par an depuis 2021.
Il y est précisé que les téléconsultations représentent 4 % des consultations facturées à l’Assurance maladie.
En 2022, le parc de cabines était estimé à environ 2 300. L’Assurance maladie, dans son rapport charges et produits pour 2024, indique qu'en 2023, 1 209 nouvelles pharmacies d’officine se sont équipées de cabines.