L'augmentation de la myopie chez les jeunes générations est un véritable défi de santé publique mondiale.

Les prévisions sont claires : si rien n'est fait, près de la moitié de la population mondiale pourrait être myope d'ici 2050. Selon une étude chinoise récente*, les prévisions chiffrent :

  • 28% d'enfants myopes de 6 à 12 ans dans le monde ;
  • 52% d'adolescents de 13 à 19 ans.

À titre de comparaison, 20% d'enfants étaient myopes en France en 2020, et 32% d'adolescents dans le monde.

Un facteur de pathologies rétiniennes au coût financier élevé

Lors des États généraux de la myopie organisés par l'IEMP*, qui se sont tenus mardi 19 novembre 2024 et ont réuni un grand nombre d'acteurs de la filière optique, plusieurs intervenants se sont relayés autour de 3 tables rondes pour aborder différents thèmes liés à la myopie. 

La professeure Aude Couturier, directrice de l'institut français de myopie, a exposé les risques médicaux liés à ce trouble visuel (maculopathie myopique, décollement de rétine, glaucome, cataracte) et son coût financier pour la société :

« La myopie peut entraîner des complications graves avec pour conséquences une baisse d'acuité visuelle irréversible. Il y a un impact économique à ces complications puisqu'elles peuvent mener à la malvoyance et à la cécité. Nous avons encore peu de données chiffrées sur les incidences économiques mais une étude espagnole a récemment montré que cette augmentation de la prévalence de la myopie forte va entraîner une augmentation des coûts de +76 % dans les années à venir, d'ici 2050. Dans la myopie forte, au-delà de -6 dioptries, l'impact financier réside dans la prise en charge des patients, mais également à la perte de productivité et donc une baisse du PIB. Cette malvoyance peut apparaître assez tôt dans la vie d'un adulte fort myope, parfois dès l'âge de 40 ans. D'où l'importance de la prévention le plus tôt possible et de contrôles réguliers ».

Aude Couturier a plaidé pour une requalification de la myopie en « maladie » pour appuyer une prise de conscience auprès du grand public, mais aussi auprès des instances publiques.

 

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Aude Couturier, directrice de l'institut français de myopie

 

Éduquer les ophtalmos

Béatrice Cochener, doyenne de faculté de Médecine de Brest et présidente du CNP d'opthalmologie (Académie Française de l’Ophtalmologie), a de son côté mis en évidence l'importance de la collaboration entre toutes les parties :

« Une première étape dans ce gros travail de sensibilisation, c'est indiscutablement d'éduquer les ophtalmologistes. Aujourd'hui, c'est officiel, il y a une obligation à la formation en pédiatrie pour tous les jeunes ophtalmologistes. Nous sommes même sur l'évolution de la mise en place d'une formation hyperspécialisée qui s'appelle la FST (ndlr : formation spécialisée transversale) et donc nous sommes vraiment sur un domaine de compétence qui va s'identifier sur le parcours obligatoire des ophtalmologistes ».

Collaboration des 3 O

« Fédérer la filière visuelle, c'est activer les ponts entre les 3 O. Je rappelle que les orthoptistes sont d'ores et déjà nos collègues puisque ce sont les facultés de médecine qui définissent le programme de leur parcours ».

« Et puis nous avons les opticiens. Il y a aujourd'hui, je vous le confirme, une grande envie de la communauté médicale de travailler de façon fédératrice. Nous sommes au coeur de cette préocupation avec le dépistage, la mise en place d'un équipement correctement remboursé et l'accompagnement dans le suivi des patients ».

 

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Béatrice Cochener, doyenne de faculté de Medecine de Brest et présidente du CNP d'opthalmologie

 

Les opticiens en première ligne

La voix des opticiens était portée par les présidents de la Fédération nationale des opticiens de France (Fnof), et du Rassemblement des opticiens de France (Rof), tous deux présents pour s'exprimer sur le rôle des opticiens dans la prise en charge des patients myopes (correction et freination).

« Aujourd'hui, ce sont nous les professionnels de santé qui avons le plus d'échanges avec les patients. Nous avons un rôle de prévention et d'information prépondérant, car le public vient souvent nous voir en premier pour nous poser des questions et obtenir des réponses. Par la suite, nous devons assurer trois suivis dans l'année pour les verres de freination, et référer à l'ophtalmologiste ou l'orthoptiste », a expliqué Jean-François Porte, président du Rof.

Un constat partagé par son homologue Hugues Verdier-Davioud, président de la Fnof :

« Nous sommes souvent les premiers interlocuteurs des parents. Ils viennent nous voir lorsque leurs enfants ne voient pas bien, et à nous de les rassurer en leur expliquant le fonctionnement physique de l'oeil et de la vision. Mais nous leur expliquons également qu'un verre de freination ne suffit pas, il mérite d'être accompagné d'un changement de comportement et de mode de vie pour avoir le maximum de chances de ralentir la progression de la myopie. Notre activité est aujourd'hui déjà transversale puisque nous jouons le rôle essentiel de relais entre le jeune patient, les parents, les pédiatres, les médecins scolaires, les instituteurs, les ophtalmologistes et orthoptistes... ».

 

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À gauche Hugues Verdier-Davioud, président de la Fnof. À droite, Jean-François Porte, président du Rof.