C'est sans doute le mot le plus prononcé lors du 2e congrès de l'optique-lunetterie durable (Cold) : transparence.
Ce jour-là (lundi 4 novembre), les intervenants qui se sont succédés sur la scène ont regretté le manque de transparence sur la provenance des produits distribués en optique-lunetterie. À l'heure actuelle, la filière visuelle dans son ensemble n'a pas encore dressé de diagnostic écologique et manque de chiffres dans l'analyse du cycle de vie des produits manufacturiers.
Données manquantes
« Ce qui manque, ce sont des données sur la traçabilité des matières premières, les conditions de fabrication selon les pays, les modes de transports, la distribution et la fin de vie des produits. Sans ces données, il est difficile de caractériser une analyse de cycle de vie (ACV) fiable », a expliqué Robin Lemaitre, co-fondateur d'Ecopaths*.
Pas de diagnostic, pas de traitement
« L’intérêt de connaître l’empreinte carbone et environnementale d’un produit permet à l'entreprise d’enclencher des actions pour réduire son impact sur l'environnement.
Il y a 3 raisons principales pour lesquelles les entreprises s'intéressent à l'analyse du cycle de vie (ACV) de leurs produits :
- la réglementation. S'assurer de respecter les normes environnementales imposées.
- établir l'attractivité des investissements. Beaucoup d’investisseurs regardent désormais de près l’empreinte carbone d’un produit. Les activités qui se passent des énergies fossiles sont les plus appréciées.
- enfin, la compétitivité, qui est liée aux deux premiers points. Agir sur son ACV augmente la valeur du produit.
Un des freins à la transparence des activités manufacturières réside souvent dans l'ignorance des entreprises de leurs propres processus d'approvisionnement et de fabrication des produits. Les sociétés ont souvent peur d'exposer leurs informations vis-à-vis de leurs concurrents et de leur écosystème et par conséquent restent opaque », observe Robin Lemaitre.
Dans ce flou, pourquoi produire en France plutôt qu'ailleurs ?
Les lunettes made in France sont-elles forcément écologiques ? était l'une des conférences du Cold.
Yan Balbach, DG de Naoned et Plan, Robin Lemaitre co-fondateur d'Ecopaths, Margaux Bédé, journaliste
Il est généralement convenu qu'une production française est plus écologique. Mais tout dépend de ce qu'on appelle "fabriqué en France" et de la place réellement occupée dans les flux commerciaux.
Sur 20 millions de lunettes vendues en France chaque année, combien sont produites sur le territoire ?
Yan Balbach, directeur général de Naoned et de Plan (Production Lunetière À Nantes), lunetier produisant 12 000 montures par an, a donné son impression générale sur la production française :
« On ne peut pas demander aux 30 ateliers produisant des lunettes en France d’assurer les besoins des porteurs Français. C'est normal qu'on soit allé chercher des montures ailleurs. Par contre, ce qui est moins normal c'est de cacher au consommateur l'origine de ces produits. Si on ne peut pas avoir du 100% fabriqué en France, on pourrait commencer par avoir du 100% transparent ».
Une opticienne présente dans le public a posé la question sur l'origine des produits qu'elle vend en magasin. Mais personne n'a pu lui répondre, ni sur scène, ni dans l'assistance.
« Nous aussi en tant que fabricants de montures, on cherche des réponses sur l'origine des produits que nous commandons et transformons. Si l'acétate que nous utilisons vient d'Italie et les charnières d'Allemagne, il nous est aussi difficile de remonter leur origine exacte », regrette Yan Balbach..
Baptiste Verneuil, du Shift Project, dans le public, a demandé quelle est la proportion de montures fabriquées en France par rapport à ce qui est vendu en magasin. « 1, 5, 10% ? » Ni les fabricants, ni les syndicats, ni les réseaux de soins, ni la presse professionnelle, n'ont pu répondre avec certitude à cette question.
*Ecopaths est une sart-up spécialisée dans l'automatisation des ACV grâce à l'IA.