Il y a 2 jours, nous vous annoncions que l’enseigne Alain Afflelou mettait à disposition des accès à la téléophtalmologie dans quelques-uns de ses magasins.

Dans un communiqué reçu ce jour, le Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof) réagit vivement à cette initiative qu’il qualifie d’« inadéquate et inutile ».

La réaction de Thierry Bour, président du Snof

« L’expérience actuelle de centres de santé ophtalmiques déviants dirigés par des gérants sans connaissance médicale nous rend méfiants. » Selon le président du Snof, « cette pratique ne contribue en rien à l’accès aux soins, la demande en équipements optiques est déjà satisfaite sur l’ensemble du territoire : 20 millions de paires de lunettes sont ainsi délivrées chaque année grâce notamment au renouvellement de l’ordonnance qui a déjà fait ses preuves, soit 30% de plus qu’en Allemagne, pays de 83 millions d’habitants. Dans les zones sous-dotées, les besoins sont avant tout médicaux et la plupart des prises en charge (glaucome, DMLA, cataracte, diabète…) nécessitent une consultation en présentiel et le respect du parcours de soins. C’est pourquoi, le Snof a élaboré plusieurs propositions pour favoriser les installations et développer les sites secondaires à même de répondre à tous les besoins visuels des patients, y compris en télémédecine, tout en sécurisant le parcours de soins. Dans l’offre de téléconsultation chez l’opticien, il s’agit très majoritairement d’ophtalmologistes lointains et inconnus du patient, salariés d’une plateforme, sans suivi. »

« L’objectif est donc bien de développer le chiffre d’affaires de l’enseigne »

Outre le manque de légitimité des opticiens à proposer ce type de services, le syndicat accuse l'enseigne de faire de l’incitation à la consommation « La communication du dirigeant de l’enseigne appuie fortement sur l’intégration de cette offre de téléconsultation dans le magasin. L’objectif est donc bien de développer le chiffre d’affaires et d’inciter le client à consommer des équipements optiques, remboursés par ailleurs par l’Assurance Maladie et les complémentaires santé ».

Le syndicat va plus loin en accusant l’enseigne de « concurrence déloyale » : « L’ophtalmologiste qui intervient lors du processus devient de fait un fournisseur d’ordonnances optiques sur incitation de l’opticien auprès de ses clients. Il intervient ainsi dans l’équilibre économique du magasin d’optique et crée une situation de concurrence déloyale vis-à-vis des magasins aux alentours, outre le fait qu’il se trouve en situation de compérage. Dans l’organisation annoncée, le médecin n’est pas en situation de proposer ou de décider de la téléconsultation. Il subit une décision prise en amont entre l’opticien et son client. Or, l’opticien, formé en 2 ans par un BTS-OL et dépourvu de règles professionnelles, n’est pas habilité à proposer de téléconsultation. »

La défiance entre opticiens et ophtalmologistes s’accroît bel et bien

En juillet, le Snof déplorait un manque de communication de la part des opticiens au sujet des adaptations de corrections optiques (relire notre news : La défiance s’accroit entre opticiens et ophtalmologistes, selon le Snof).

Thierry Bour conclut ainsi le communiqué en rappelant le cadre légal de cette communication : « Malgré une obligation règlementaire, seulement une petite minorité d’opticiens fait le retour d’information vers l’ophtalmologiste en cas de renouvellement des lunettes avec le dispositif de l’ordonnance renouvelable. Par ailleurs, les contrôles réalisés par la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes dans le cadre du 100% Santé ont relevé un taux élevé de non-conformité. Ces problèmes sont à régler de façon prioritaire. Nous demandons à la représentation nationale actuellement réunie pour l’examen du PLFSS de mieux encadrer les pratiques de téléconsultation (article 28) et d’interdire les offres à vocation commerciale. »

 

La demande de soins existe pourtant et nous allons publier prochainement une étude sur les attentes des porteurs français en téléophtalmologie.