Acuite : Vous souhaitez que la profession s’unisse, pour quelles raisons lancez-vous cet appel ?
Nicolas Sériès, président de Zeiss Vision Care France : Il y a de nombreux enjeux auxquels la filière va être confrontée dans l’avenir mais il y en a un en particulier qui me semble primordial et dont beaucoup d’acteurs de la filière sous-estiment l’ampleur. Je veux parler de la mainmise de l’État sur notre marché.
Cela n’aura échappé à personne que depuis plusieurs années dans le marché libre de l’optique ophtalmique, des encadrements législatifs sont venus rebattre les cartes du jeu. Peu à peu, l’État étend sa toile, dont voici quelques exemples :
- Le délai de remboursement d’équipements a été étendu de 1 à 2 ans
- Le plafonnement du remboursement des verres et celui des montures qui est passé de 150 à 100 euros
- L’apparition du 100% Santé avec la fixation des tarifs des verres unifocaux et progressifs d’un panier A qui représente déjà 18% des ventes totales
- La volonté affichée d’augmenter la part du 100% Santé, en imposant par exemple un questionnaire de satisfaction à l’ensemble des porteurs, qu’ils soient clients du panier A ou du panier B
- Le décret de mars 2021 qui oblige les fabricants et distributeurs à communiquer au CEPS* l’intégralité de leurs prix de vente aux opticiens
Toutes ces mesures ont permis à l’Etat de se désengager financièrement de la prise en charge des équipements optiques tout en conservant la traçabilité très précise des équipements, dans un marché dont il redéfinit progressivement les contours. Il serait bien naïf de croire que cette ingérence va s’arrêter là : le ministre de la Santé a rappelé dans ses vœux de début d’année l’élargissement prochainement du panier A. Au même moment, la Loi de financement de la sécurité sociale de 2023 instaure la possibilité par l’Etat de fixer les marges de la distribution et de limiter les remises des fabricants. Nous assistons à l’imbrication de pièces successives qui viennent constituer un puzzle dont le tableau final ne sera pas favorable au marché libre de l’optique. Il ne faut pas oublier que le marché français est le 1er d’Europe, et chaque opticien y contribue autant qu’il en bénéficie. Cet équilibre est de plus en plus menacé et le risque est considérable.
AC : Quelles en seraient les conséquences ?
NS : Dans un 1er temps, l’élargissement des produits contenus dans le panier A est une menace pour l’ensemble de la filière : il faut savoir que les équipements 100% Santé ont un prix moyen 70% plus bas que le prix moyen du panier B. Si des produits comme le traitement anti-lumière bleue, et pourquoi pas les verres de freination de la myopie, les verres pour la conduite et d’autres encore, se retrouvent inclus dans le panier A, il ne restera dans ces conditions plus grand-chose dans le panier B en dehors des toutes dernières innovations. Ce serait un coup de rabot monstrueux, qui pourrait être accompagné d’ici quelques années par une fixation des marges comme la loi le permet désormais. Et si les marges des distributeurs baissent, il deviendra obligatoire de s’approvisionner depuis des pays lointains à moindre coûts. Pour l’industrie, ce serait synonyme de fermetures de sites de production en France et de leur côté les opticiens qui vendent peu de volumes, seront rapidement forcés de mettre la clef sous la porte. Ce serait un désastre pour tout le monde, y compris pour l’amétrope qui ne bénéficiera plus du maillage territorial exceptionnel qu’assurent les opticiens aujourd’hui.
AC : Quelles solutions proposez-vous ?
NS : Mon opinion, personnelle, c’est que la profession dans sa globalité, industriels, distributeurs, complémentaires santé, syndicats, réfléchisse à une position commune pour empêcher ce sinistre scénario de voir le jour. En mettant nos différends de côté, une filière unie peut éviter que l’État termine de tisser sa toile qui englobe progressivement notre marché : son objectif est de le nationaliser, de créer la grande sécu à laquelle l’administration tient tant et faire en sorte que les Ocam remboursent de moins en moins le panier B pour allouer cet argent à d’autres secteurs de la santé. Il est anormal, étant donné le taux insignifiant de remboursement en optique de la part de la CPAM, de l’ordre de 9 centimes par équipement, que l’État se permette d’administrer notre marché comme il le fait dans d’autres domaines de santé où il prend en charge la majorité de la dépense. À nous d’élaborer une stratégie d’alliance pour ne pas nous tromper d’ennemi : si beaucoup d’opticiens considèrent les organismes complémentaires comme une menace, ce sont pourtant eux aujourd’hui les garants du dynamisme de notre marché qui est le 1er d’Europe. Actuellement, le véritable danger vient d’ailleurs, de manière insidieuse, et nous devons regarder ensemble dans la même direction pour lui faire face.
*CEPS : Le Comité économique des produits de santé est un organisme interministériel chargé par la loi de fixer les prix des médicaments et les tarifs des dispositifs médicaux à usage individuel et prestations associées pris en charge par l’assurance maladie obligatoire.
Ainsi l'obligation pour les OCAM de prendre en charge le 100 pour 100 santé a eu pour effet de phagocyter, rafler les prestations, au point de réduire fortement ce qui était consenti pour le marché libre. Il est fréquent de constater que la prise en charge d'un contrat pour le 100 pour 100 santé est cinq, dix, voire vingt fois supérieur comparé à la prise en charge du marché libre. Le client va d'ailleurs pouvoir le constater à chaque demande de prise en charge des devis panier A et panier B imposés, cela également pour l'acoustique et le dentaire.
Imaginons un assuré qui "consomme" dans la même année une paire de lunettes progressives, deux aides auditives et une couronne dentaire, ses organismes CPAM et complémentaire débourseront 200€ + (2X 950€) + 500 soit globalement 2600€. Notez d'ailleurs que si les frais de fonctionnement de ces organismes sont de 33% des cotisations, alors il faudra collecter 3900€ de cotisations. Par comparaison, le tarif de base (sécu) d'un appareil auditif est de 400€, celui d'une couronne dentaire est de 120€, une complémentaire qui couvre 30 pour cent de ces sommes déboursera 120€ pour un appareil acoustique et 36€ pour une couronne. Mesurons ainsi ce que coûte le 100 pour 100 santé qui risque d'ailleurs être de plus en plus demandé du fait des fortes diminutions des prises en charge du marché libre. C'est un peu comme le chien qui se mord la queue !
Depuis des années nous assistons à la volonté des OCAMS de tout encadrer pour rembourser moins ET de moins en moins souvent,et ce,de différentes manières..
MAIS effectivement,ce sont encore les OCAMS qui,par leur remboursements,permettent de maintenir notre activité,meme si les RAC sont de plus en plus lourds...
En prenant du recul sur ce qui s'est passé et ce qui continue et continuera à se mettre en place,ce ne sont plus les OCAMS qui agissent en arrière plan ,mais bien l'état et le ministère de la santé, avec une complète régulation ou nationalisation,appelez le comme vous voudrez,et une main mise totale sur notre activité.
Le remboursement vertueux de 9cts de la part de la sécu ne nous sauvera pas,alors qu'il devrait nous laisser tranquilles !!
Pour l'état,c'est donc certainement le remboursement des OCAMS qui est,désormais,en ligne de mire,et ce,pour etre détourné et utilisé dans d'autres domaines de santé...
Le futur remboursement des lunettes,coté OCAMS,se rapprochera ainsi du montant maximum de leur participation,que nous mettons déjà sous le nez des clients avec le détail du 100% santé dans le devis normalisé..
OUI "l'ennemi' n'est plus le meme....
Il existe déjà un collectif des verriers qui veulent alerter les pouvoirs publiques mais dont le leader mondial Italien ne prends par part.
La plupart des verriers proposent des verres "booster" suivant les différents réseaux.
Il existe pourtant des verriers qui refusent le référencement par les OCAM et qui sont vraiment indépendant.
Zeiss fait il parti de ceux-ci ?
On va vous répondre que non,c'est toujours au voisin de faire le premier pas !!!
À qui profite le crime ??
Quand à l’union des industriel, elle doit bien valoir celle des opticiens: tant que je peux me faire un euro sur le dos de mon con (curent, frère ?) pourquoi réfléchir ?..