Lors d’une conférence de presse, le syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof) a exposé son analyse de la situation concernant l'accès aux soins, le travail aidé en cabinet d'ophtalmologie et le rapport entre les 3 O (ophtalmologistes, orthoptistes et opticiens).
La collaboration avec les opticiens progresse modérément
L’étude de la Snof confirme les premiers chiffres présentés à la SFO en mai dernier par rapport au développement du travail aidé dans les cabinets d’ophtalmologistes qui s'entourent de plus en plus de professions paramédicales dont des opticiens.
Les opticiens salariés sont en hausse modérée : 18 % des ophtalmologistes libéraux font appel à eux (14,5 % en 2021). 517 opticiens sont salariés de cabinets d'ophtalmologie.
- Dans 86 % des cas, ils travaillent avec des orthoptistes et dans 51 % avec des infirmières (proportions stables)
- 9 % des opticiens en cabinet interviennent isolément (cela concerne 1,6 % des ophtalmologistes) contre 13 % en 2021
- Ils sont de plus en plus souvent incorporés à l’équipe d’assistants. Certains peuvent avoir incorporé un cursus d’assistant médical en ophtalmologie
- Ils sont présents chez 9 % des ophtalmologistes en secteur 1 et 22 % en secteur 2
« Le travail aidé joue un rôle primordial dans l’amélioration des délais de rendez-vous : ces derniers ont été réduits significativement en quelques années seulement, le délai médian dans le cas d’une prise de rendez-vous pour une consultation périodique non urgente est passé de 66 jours en 2017 à 28 jours en 2022. Si le travail collaboratif continue de faire ses preuves, nous sommes convaincus que le parcours de soins visuels peut encore être optimisé sur l’ensemble du territoire grâce à des mesures proportionnées et durables » a commenté le docteur Thierry Bour, président du Snof.
Renforcer les échanges avec les opticiens
Les propositions du syndicat visent à établir une offre de soin cohérente sur les territoires en s'appuyant sur la collaboration entre les 3 O. Parmi celles-ci, plusieurs concernent les opticiens :
- Optimiser la coordination avec les orthoptistes et les opticiens, en faveur d’un parcours de soins visuels éthique et dans l’intérêt des patients. L'extension des prérogatives de ces 2 métiers ces derniers mois avec la primo-prescription pour les orthoptistes et l'adaptation des primo-prescriptions par les opticiens nécessite d'être incorporé aux ordonnances numériques, actuellement en développement par les éditeurs de logiciels. L'ophtalmologie est la seule discipline médicale qui peut impliquer une modification des ordonnances, ce qui rend complexe la création d'une e-prescription par les éditeurs. A terme, pour fluidifier les échanges entre les professionnels de la santé visuelle, un retour automatique par écrit pourrait être imaginé.
- Améliorer le renouvellement des équipements optiques chez l’opticien, sous condition d’un vrai échange d’information en retour, notamment au travers d’outils numériques comme l’e-prescription et la messagerie sécurisée. Pour définir les situations où ces échanges sont indispensables, il manque un décret qui viendrait préciser les conditions d'application de la PPL Rist. Il devrait être publié au plus tard en 2024.
- Instaurer un dispositif de règles professionnelles pour les opticiens et les orthoptistes, conformément à ce qui est prévu depuis 2010 dans le Code de la Santé Publique. Le Snof fait référence ici à l'absence de code de déontologie chez les opticiens (ainsi que dans d'autres professions médicales comme les orthoptistes, les orthophonistes, les audioprothésistes, les diététiciens...). Alors que le champ de compétences des opticiens s'est élargi, ils restent soumis au code de déontologie médical. « Il s'agit de répondre à la question : qui contrôle et qui sanctionne en cas de problèmes ? », explique Thierry Bour. « Puisque la profession est réticente à mettre en place un ordre professionnel des opticiens, faut-il envisager une mise sous tutelle des ARS ou des préfets ? Faut-il imaginer un Conseil de l'Ordre qui rassemblerait toutes les professions paramédicales qui n’ont pas de code de déontologie et composé de plusieurs chambres propres à chaque profession ? Cela impliquerait aussi que les prérogatives des syndicats soient remaniées au profit de cet Ordre ».
- Évaluer les conséquences de ces changements avant d’envisager de nouvelles évolutions.
« Le syndicat se positionne également en faveur de l’encadrement strict des centres de santé ophtalmiques et de la suppression des offres de télémédecine à visée commerciale dans les supermarchés et magasins, et sur l’instauration de règles professionnelles pour les opticiens-lunetiers et les orthoptistes à l’instar des infirmiers » a précisé Thierry Bour.
Rappelons que plusieurs centres de santé ont été déconventionnés récemment et que le Snof a déjà dénoncé les mauvaises pratiques et les offres de télémédecine « débridées » et non conformes.