Après nos résumés des conférences du Dr. Barbara Ameline sur le coût environnemental de la chirurgie de la cataracte et de Philippe Gardon, opticien oculariste sur les prothèses oculaires, acuite.fr vous propose parmi la vingtaine de présentations de la 11e édition des Journées d'Etudes Vision & Prospective : « Lentilles au travail et en conditions extrêmes ».
Le Dr. Sylvie Berthemy, ophtalmologiste, praticien des Hôpitaux, consultante au Commissariat à l’énergie atomique, a axé la première partie de son intervention sur l'oeil au travail et les conseils à connaître pour éviter les désagréments ou les pathologies. « Lorsqu'on examine des patients en cabinet d'ophtalmologie, on pose rarement la question du travail. Pourtant, certaines activités peuvent provoquer des intolérances ou des problèmes d'intolérances au port de lentilles de contact », a-t-elle indiqué.
Dr Sylvie Berthemy
Il convient ainsi d'examiner chaque situation, notamment en présence des facteurs suivants :
- Une exposition à une atmosphère sèche, par exemple dans les bureaux, peut diminuer la qualité du film lacrymal et donc accentuer la sécheresse oculaire. « On recommande dans les bureaux une micrométrie de 40 à 60% », a-t-elle fait savoir. « Les porteurs de lentilles ont une diminution de la sensibilité de la surface oculaire, ce qui réduit le phénomène de clignement et de réflexe aqueux de la glande lacrymale. Actuellement, il y a peu de problèmes car quand on équipe un patient en lentilles de contact, on élimine ceux qui ont un syndrome de l’œil sec », a poursuivi l'ophtalmologiste.
- Les lieux où le nombre de particules en suspension dans l'air est sans cesse contrôlé : les salles blanches. Utilisées en micro-informatique, pour les nouvelles technologies ou encore la recherche médicale, « ces salles doivent respecter des normes de température, d'humidité et d'hygrométrie », nous a-t-elle indiqué.
- Les milieux secs : dans les salles anhydres impliquant la fabrication de batteries électriques, l'atmosphère est contrôlée en humidité (taux inférieur à 2%) et en température. Les recommandations du Dr. Sylvie Berthemy : « le port de lentilles en silicone hydrogel. Les LRPG sont de plus en plus rarement préconisées ».
- Les milieux poussiéreux : la biomasse qui représente l'ensemble de la matière organique (bois, déchets, boues d'épurations…), d'origine végétale ou animale. Toute l'énergie récoltée est recyclée par exemple pour chauffer des bâtiments. Comme l'a expliqué la praticienne, « les lentilles rigides sont très difficiles à supporter. Les lentilles souples peuvent servir de bouclier dans un premier temps, c'est-à-dire en cas de projection de particules dans l'œil. Toutefois, elles doivent être changées le plus fréquemment possible. On conseille donc au patients des lentilles journalières ».
- Une exposition à des produits chimiques : « Nous avons donné directement aux sociétés des consignes strictes pour les porteurs de lentilles de contact. Les acides font mal, même si en général, il y a un réflexe de larmoiement qui élimine la plupart du produit », insiste-t-elle. Parmi les gestes à adopter selon le Dr. Sylvie Berthemy lorsqu'une personne est victime d'une attaque par acide : « retrait immédiat des lentilles puis rinçage à l'eau de l'oeil avec une seringue ». L'ophtalmologiste déconseille l'utilisation d'une pommade pendant 24 h et favorise l'instillation de collyres de manière à éliminer les dernières particules qui peuvent exister. « Dans un premier temps, les lentilles rigides sont protectrices de la cornée alors que les lentilles souples sont un réservoir de produits toxiques. Mais quoi qu'il arrive, il faut absolument retirer les lentilles ».
- Les milieux soumis aux rayonnements : « Au sein de l'Institut National de l'Energie solaire (Ines), les chercheurs travaillent avec des lumières très fortes, appelées lumière blanche. Cela provoque des photokératites qui sont les mêmes avec ou sans lentilles de contact. La protection solaire des lentilles n'a pas grand intérêt », a-t-elle précisé.
Lentilles et grand froid
Dans la seconde partie de sa conférence, le Dr. Sylvie Berthemy nous a relaté une étude du comportement des lentilles chez les glaciologues en Antarctique. L'ophtalmologiste avait équipé en lentilles rigides port permanent pendant un mois et demi, un patient qui a traversé le pôle nord en traineau en solitaire. Durant son séjour, l'individu « n'a jamais nettoyé ses lentilles, car le produit pouvait congeler ». « Mon patient n'a rencontré aucun problème. L'intérêt des lentilles rigides, c'est la perméabilité à l'oxygène », a-t-elle rappelé.
Et d'argumenter : « les porteurs de lentilles sont très sensibles au vent car ça dessèche et projette des cristaux de neige en suspension. Les lentilles souples sont donc très mal supportées, elles se rigidifient d'après nos retours d'expériences. De même, les lentilles rigides de petits diamètres sont très déconseillées ». En outre, pour se protéger des rayons solaires, « les lunettes doivent être très protectrices avec coques latérales » a conclu le Dr. Sylvie Berthemy.
Lire aussi les résumés des conférences :
Le coût environnemental de la chirurgie de la cataracte
Focus sur l'activité d'opticien oculariste
L'oeil et l'environnement et conclusion du Pr Tristan Bourcier