Après avoir interrogé les dirigeants des enseignes, Acuité vous propose un tour d’horizon des centrales d'achats. Marc Klein, directeur de la Centrale des opticiens (CDO), dresse un premier bilan de la reprise de l’activité et se projette sur les prochains mois. Interview.
Acuité : Quels enseignements tirez-vous de la reprise de l’activité ?
Marc Klein : La volumétrie réalisée par nos adhérents au mois de juin sera connue à la fin du mois lorsque tous les fournisseurs auront établi leurs factures. Néanmoins, les verriers nous indiquent que le niveau de facturation des adhérents de la CDO est conforme aux années précédentes sur la même période. La reprise est bonne, y compris en ce début du mois de juin. Le mois de juillet sera-t-il un mois normal ? Allons-nous connaître un infléchissement en raison de la pénurie d’ordonnances ? De la conjoncture économique ou des pertes d’emplois ? Ce sont plusieurs interrogations que nous nous posons.
Acuité : Quelles mesures avez-vous prises durant le confinement ?
M. K : Toute la CDO a été mobilisée durant cette période de confinement, afin d’informer et d’accompagner au mieux nos adhérents. Nos développeurs-conseils ont été présents tout au long de cette épisode. Nous avons réalisé des commandes groupées de produits sanitaires : masques, gel hydroalcoolique, visières, stérilisateurs UV…
Sur le volet financier, notre discours était clair : maintenir le paiement des fournisseurs et apporter notre aide à l’ensemble des opticiens. Parmi les mesures de soutien : un échelonnement des paiements, des avances de remises de fin d’année (RFA) et nous avons débloqué les fonds de notre programme de fidélisation à la CDO (bonus 40 ans).
Nous avons également accompagné les opticiens, grâce à notre outil d’analyse financière permettant la segmentation la dette (fournisseurs, organismes financiers ou publics) pour l’obtention du prêt garanti par l’Etat (PGE) ou de prêt rebond. Un accompagnement d’analyse financière leur est proposé au travers d’Audit’optic. Nos adhérents peuvent ainsi facilement déterminer les leviers pour réduire ou reporter leurs dépenses.
Acuité : Compte tenu de la crise sanitaire, certains de vos adhérents sont-ils en difficultés ?
M. K : Je pense que les difficultés financières sont à venir. Certes, des PGE ont été octroyés, mais il va falloir les rembourser. Certains opticiens en difficulté structurelle avant le confinement risquent donc d’être impactés en 2021.
A date, nous avons déjà enregistré un doublement des demandes d’échelonnement des factures de nos adhérents. Indéniablement, ce nombre pourrait croître dans les prochains mois. Nous sommes très vigilants sur ce point. 2021 resta une année charnière.
A. : Pensez-vous que la crise sanitaire va accélérer la transformation du monde de l’optique ?
M. K : Les transformations porteront sur 2 plans :
- L’accueil du client : Les opticiens étant des professionnels de santé, ils se doivent de prendre les mesures sanitaires qui s’imposent. Elles changeront automatiquement le process de vente et d’approche du consommateur (choix et conseils plus personnalisés, privilégier les RDV en magasin…).
- Le rôle du professionnel de santé : informer son client du possible renouvellement de son ordonnance en adaptant les corrections optiques nécessaires. De cette façon l’opticien retrouve son vrai cœur de métier et non un simple rôle de commerçant.
Par ailleurs, après cette crise sanitaire, plusieurs questions se posent : où les consommateurs se rendront-ils pour effectuer leurs achats ? Se sentent-ils plus rassurés dans les magasins de proximité ? Iront-ils dans les centres commerciaux ? De même, l’émergence du télétravail risque d’inciter les salariés à consommer plus localement en lieu et place de leurs comportements habituels, et ce jusqu’en septembre - octobre.
Enfin l’impact social, chômage partiel ou licenciements, contribuera certainement à une augmentation en volume des équipements du panier A.
A. : Comment va évoluer le marché en 2021 ?
M. K : Côté sanitaire : en fonction de la présence ou non d’une seconde vague le marché de l’optique pourrait ré-atteindre un niveau standard en 2021. Coté prescription médicale : le déficit d’émission d’ordonnances (entre 2 -3 millions) pourrait considérablement impacter notre profession. Sur le volet financier : mon inquiétude porte sur la trésorerie des opticiens l’année prochaine.
La bonne nouvelle : la reprise a été meilleure que prévue à date. Le volume de commandes des verriers est équivalent sur la même période voire supérieur certaines semaines. Pourvu que cela dure…
A. : Quelles sont vos perspectives de développement à moyen terme ?
M. K : La CDO a un plan stratégique sur 3 ans sur différents axes, y compris l’audio. Nous avons aussi des projets importants sur la partie digitale. Notre souhait, regrouper l’ensemble de nos services : prises de rendez-vous, commandes de matériels, campagnes de communication, services financiers, outils de gestion de trésorerie… sur notre site intranet.
La CDO va devenir une vraie plateforme dans le but de faciliter le travail de l’opticien. La mise en place d’une vingtaine de services va débuter en 2021.