Dans une news parue la semaine dernière, nous vous annoncions qu'un non-voyant avait recouvré la vision à partir d'une dent appartenant à son fils. Bob McNichol, un Irlandais âgé de 57 ans, avait perdu la vue à la suite d'une explosion d'aluminium liquide. L'opération chirurgicale qui lui a permis de retrouvrer la vue consiste à fabriquer un support pour une cornée artificielle à partir d'une dent. Dans le cas de Bob McNichol, c'est son fils Robert qui a fourni la matière nécessaire à l'opération.
Interrogeant le Dr. Bernard Duchesne, ophtalmologiste à l'Université de Liège, nos confrères de l'AFP sont revenus sur cette opération imaginée il y a des décennies par un ingénieux spécialiste italien.
"500 à 600 interventions de ce type ont été pratiquées au total dans le monde", indique le Dr. Duchesne, l'un des huit spécialistes au monde, avec notamment le Français Emmanuel Lacombe. La technique, baptisée ostéo-odonto-kératoprothèse, a été "inventée par Benedetto Strampelli en 1956. Il s'agit d'une alternative à la greffe de cornée, quand cette dernière n'est pas possible, mais aucunement bien sûr d'un remplacement de l'oeil entier par une dent", précise M. Duchesne, en admettant que "cette technique, très lourde en durée et personnel, n'a jamais été très en vogue".
Schématiquement, "tout matériau synthétique directement implanté dans l'oeil se voit expulser par la couche de surface, c'est-à-dire l'épithélium, et c'est encore plus vrai au niveau de la cornée", explique l'ophtalmologiste. "Or, l'inventeur a observé que dans l'organisme, deux matériaux rigides pouvaient être en contact sans problème avec de l'épithélium, les ongles et les dents".
Concrètement, le bloc ostéo-dentaire est prélevé et meulé afin d'obtenir une petite plaque rectangulaire de 2,5 à 3 mm d'épaisseur. Celle-ci est ensuite percée pour y introduire une simple optique en plastique transparent. L'ensemble est placé sous la peau du patient pendant 3 mois pour qu'il s'entoure de tissus fibreux rendant possible la pose de points de suture.
"Parallèlement, on prépare l'oeil en lui enlevant la fine couche qui le recouvre (kératotomie) et en la remplaçant par de la muqueuse buccale, afin que la dent retrouve le milieu auquel elle est habituée", poursuit M. Duchesne.
L'aspect n'est pas très joli - pupille sans iris, couleur rosâtre - mais une grande lentille de contact avec un iris dessiné dessus peut le rendre acceptable. Des lunettes permettent d'adapter ensuite la vue. "La récupération visuelle est suffisante pour conduire une voiture", conclut le Dr. Duchesne, en évoquant le cas d'un chauffeur de taxi à Rome, opéré de cette manière. Quant à Bob McNichol, il juge qu'il voit désormais suffisamment pour se déplacer et regarder la télévision.
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