« Il est interdit d'interdire ». Ce célèbre slogan résume à lui seul la jurisprudence relative à l'e-commerce. Dans un arrêt du 31 janvier dernier, la cour d'appel de Paris confirme qu'un fabricant ne peut pas interdire à ses distributeurs de vendre ses produits sur Internet. Rendue dans le cadre d'une procédure impliquant le groupe de cosmétiques Pierre Fabre, qui s'oppose à la commercialisation de ses marques sur le web, cette décision confirme l'avis rendu en septembre 2012 par l'Autorité de la concurrence, selon lequel « les conditions relatives à la vente en ligne des produits doivent être équivalentes à celles posées pour la vente en magasin ». La justice parisienne suit également les conclusions de la CJUE (Cour de justice de l'Union européenne) qui, en 2011, avait estimé que la société Pierre Fabre opérait une « restriction de concurrence » prohibée par le droit communautaire.
Internet permet « d'interagir avec le client », estime la Cour
Les juges sont restés sourds aux arguments du laboratoire, pour qui « la vente à distance des produits dermo-cosmétiques ne peut garantir le conseil personnalisé d'un professionnel qualifié, favorise la contrefaçon, et empêche une traçabilité parfaite des produits ». En effet, selon la Cour d'appel de Paris, « aucun élément n'établit qu'une information et un conseil personnalisé de qualité ne puissent être organisés en ligne. Un site est susceptible d'être organisé comme une vitrine de présentation et permet une interaction avec le consommateur, au travers par exemple d'une hotline destinée à assurer des conseils personnalisés par une personne diplômée en pharmacie ».
Le fabricant peut exiger des « standards de qualité pour la vente en ligne »
Cette jurisprudence est susceptible d'être applicable, en cas de litige, à notre secteur : en tout état de cause, un fournisseur qui a agréé un magasin ne peut s'opposer à ce que le dirigeant de ce point de vente distribue ses produits en ligne sur son propre site e-commerce. L'Autorité de la concurrence admet cependant que le fabricant « exige que le site Internet du distributeur respecte des standards de qualité, comme la sécurisation des paiements ou la présentation des pages dédiées aux produits ». La CJUE estime par ailleurs que l'interdiction d'une commercialisation sur Internet peut être exceptionnellement tolérée si elle est « objectivement justifiée ». Ce sera alors au fabricant de prouver cette « justification objective », en invoquant par exemple des éventuelles conséquences sur la santé des clients.
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