Lors de la lecture au Sénat le 14 février 2023, cet amendement a été jugé non recevable au motif qu'il serait trop onéreux pour les finances publiques (article 40 de la Constitution). Il prévoyait une facturation de 28 euros par acte (protocole Muraine). « L'amendement, co-signé par 2 médecins, a suscité beaucoup de réactions intéressées de la part de mes collègues au Sénat », explique Else Joseph, sénatrice des Ardennes et auteure du texte, que nous avons contacté. « Nous sommes tous confrontés aux déserts médicaux, particulièrement dans nos territoires ruraux, et cet amendement visait à introduire une notion de prévention assurée par les opticiens qui bénéficient d'un maillage territorial important sur lequel il est temps de s'appuyer. Ils ne sont pas des médecins, mais ils sont déjà formés pour pouvoir créer des avant-postes pour le dépistage. Dans le parcours de soin des patients, il faut pouvoir simplifier la donne ». Cette proposition d'amendement sera représentée dès que l'occasion se présentera, assure la sénatrice.
Le 9 février, la sénatrice des Ardennes Else Joseph (LR) a déposé un amendement à l'article 4bis de la PPL Rist en proposant le dispositif suivant :
"Dans les départements où le nombre d’ophtalmologues par habitant est inférieur à un certain seuil, le directeur général de l’agence régionale de santé peut autoriser, à titre expérimental, à compter de la date fixée par arrêté du ministre chargé de la santé et jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant cette même date, les opticiens-lunetiers, en tant qu’assistants d’une consultation médicale d’ophtalmologie et à des fins de dépistage, à utiliser des matériels d’exploration fonctionnelle non invasifs".
Explication de l'amendement par l'auteure
"Le présent amendement vise à concrétiser la recommandation n°12 du rapport publié conjointement par l’IGAS et par l’IGESR en janvier 2020 (« La filière visuelle : modes d’exercice, pratiques professionnelles et formations »). En permettant la mise en place d’une liste de matériels d’exploration non invasifs utilisables par les opticiens-lunetiers, cet amendement permet de répondre à la problématique du dépistage des troubles visuels dans les déserts en santé visuelle dont la situation risque d’être aggravée par la démographie médicale. Il répond aussi au constat établi par l’IGAS et l’IGESR relatif à l’insuffisance des protocoles déjà mis en place dans la filière visuelle.
Adapté aux compétences des opticiens
Il s’agirait ainsi d’autoriser les opticiens à utiliser un tonomètre-pachymètre à air et un rétinographe non mydriatique. Ces appareils sont similaires à ceux que les opticiens utilisent pour déterminer la réfraction dans le cadre du renouvellement avec adaptation d’une ordonnance médicale. Cela se justifierait au regard de la formation actuelle des opticiens dont une partie du temps (861 heures sur 2517) est dédié à la compréhension et à l’utilisation de ces outils afin d’identifier une anomalie visuelle, puis de déterminer la réfraction nécessaire à la compensation. En outre, depuis 2007 et l’autorisation d’utilisation par l’opticien de l’ensemble des appareils de réfraction objective, aucun cas de mésusage n’a été constaté.
Une solution progressive et prudente
Cela constituerait un début afin de permettre la mise en place pour les opticiens-lunetiers d’un équivalent au protocole RNM (protocole dit Muraine). Cela permettrait l’autorisation d’un dépistage en centre optique des troubles de la réfraction des patients de 6 à 50 ans. Les résultats seraient ensuite transmis à l’ophtalmologue, soit en vue d’une prescription, avec la mise en place d’un financement dérogatoire qui pourrait être calqué sur celui du protocole Muraine (28€ pour le code/acte), soit en vue d’une consultation, en cas de suspicion par l’ophtalmologue d’un trouble sérieux le justifiant.
Une telle expérimentation est par ailleurs une solution progressive et prudente au regard des recommandations du rapport conjoint à l’IGAS et à l’IGESR".
La PPL de Mme Rist sera examinée au Sénat à partir de la semaine prochaine, dont un autre amendement concerne directement notre secteur puisqu'il vise à inscrire dans la loi l’adaptation par les opticiens des primo-prescriptions.
Étrange addiction des opticiens à vouloir se rajouter des chaines entravantes : quel est l intérêt de demander une liste du matériel autorisé et ce uniquement dans trois régions et sous dépendance d'un statut d assistant médical !? Je me demande s'il est possible de rajouter plus de contraintes ?! Ça me fait penser à la complexité de prescription pour les orthoptistes qui doivent vérifier 31 critères précis. Vont ils les respecter ? Ils auront pour le moins besoin d'une super protection juridique, tout manquement relevant du pénal...
Tous les appareils de mesures objectives sont DEJA autorisés du moment que nous ne posons pas de diagnostic médical !
Nous n'utilisons pas des appareils "similaires" sur toute la France. La réalité est que sont déjà utilisés des appareils identiques à ceux décrits.
Le vrai sujet est de renforcer notre formation pour développer un rôle d'ACTEUR DE PREVENTION.
Finalement la prévention à notre échelle, ce n'est pas de poser un diagnostic mais de mettre en valeur notre maillage territorial et notre facilité d'accès pour aider à orienter efficacement les patients. Nous pouvons devenir une porte d'entrée au parcours en santé visuelle.L'ophtalmologie a mis un verrou à l'accès aux équipements visuels au nom du dépistage. Mais l'inégalité d'accès à l ophtalmologiste selon différents critères (localisation géographique, âge, niveau social, urgence...) a rendu cette promesse fictive. Il est temps de réviser cette approche obsolète.
Les orthoptistes ont une liste de matériel qu'ils peuvent utiliser dans leur décret de compétence, ça ne semble pas être un frein pour eux. Pourquoi ne pas s'inspirer de ce que les orthoptistes ont fait en utilisant la technique des petits pas? Ils ont un décret de compétence qui les couvre dans leur pratique, une cotation pour faire un examen de vue (22€10 tout de même) des protocoles de coopération, et maintenant la possibilité de prescrire (certes avec des restrictions mais tout de même!) En attendant qu'avons-nous obtenu de notre côté. A tout vouloir tout de suite on risque de se retrouver avec rien.
Ma critique sur cet amendement n'est pas sur le fond de la démarche mais sur la forme. Vouloir amener une réforme n importe comment peut être contreproductif et nous emmener dans le mur. Regardez le crash de la maîtrise d Orsay après avoir voulu faire passer en force l optometrie sans sécuriser son cadre législatif. Ou aussi la signature du 100% santé sans contreparties (il aurait fallu : une véritable libération de la classe B face a l asservissement des réseaux et à l entonnoir de l ordonnance ophtalmologique ; le développement de prestations séparées des ventes de lunettes et rémunérées) : son inéluctable montée en puissance va poser un vrai problème économique pour nos magasins et leurs emplois.
Reconnaissez tout de même qu'il n'y a pas grand intérêt à ce qu'un opticien puisse utiliser un tonomètre, un OCT, un rétinographe, un topographe, etc, si personne ne peut les interprèter à l'arrivée. Ne pas avoir de liste précise de matériel utilisable par les opticiens c'est donc faire une croix sur toute collaboration avec les ophtalmos.
Intégrer les opticiens au protocole Murraine aurait, à mon humble avis, le double avantage d'améliorer la prise en charge des patients et améliorer les relations ophta-opticien qui ne sont pas au beau fixe.
Sur le cavalier seul d'ophtacity je vous rejoins totalement, c'est dommageable pour la profession.
J'avoue ne pas maitriser toutes les subtilités de la politique, mais quand je lis les objectifs de la loi RIST : "La proposition de loi répond à deux objectifs : lutter contre les déserts médicaux et améliorer l'accès aux soins", je ne trouve pas que cet amendement était complètement hors sol.
Je n'ai pas bien suivi l'épisode du crash de la maitrise d'Orsay, j'ai seulement retenu que c'était avant tout du à un manque d'unité de nos syndicats.
De toute façon si nous continuons à être divisé, nous irons au devant de nouveaux échecs. Je ne comprends pas que nos syndicats (et donc tous les opticiens par extension) ne soient pas capable de s'accorder sur un programme commun à pousser auprès des politiques (Formation, Amélioration du 100% santé pour éviter le danger que vous soulevez à juste titre, actualisation du décret de compétence, réinventer la coopération avec les ophtalmo en s'inspirant de ce qu'on fait les orthoptistes). Nous sommes peut être une cause perdue...