Prendre en charge à 100% les lunettes d’ici 2022, une promesse chère à notre nouveau Président, Emmanuel Macron. Un engagement qui concerne une large majorité de Français, puisque 47 millions (soit 2 sur 3) portent des lunettes. En toute logique, ce chantier devrait faire partie des priorités de la nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn. Mais si la promesse est séduisante, elle semble "peu réaliste et raisonnable pour la santé visuelle", selon Stéphanie Dangre et Jérôme Schertz, présidente et directeur général de Supercent*.
"Tordre le coup aux idées reçues"
Pour les deux dirigeants, qui ont déjà interpellé le candidat avant l'élection, "les lunettes ne sont pas plus chères en France que dans les autres pays européens ! Mais si le prix des équipements est favorable en France, les dépenses globales en optique sont effectivement plus élevées car nos compatriotes plébiscitent la qualité des produits. Il est faux d’affirmer que les prix en optique augmentent sans cesse et sont trop élevés. Au contraire, ils s’autorégulent sous l’effet de la concurrence intense du secteur. Ainsi, l’ensemble des prix à la consommation a cru de 18% entre 2003 et 2013 contre 10% pour l’ensemble de l’optique médicale, relève l’Insee. Il n’est pas économiquement possible pour les réseaux de soins assujettis aux mutuelles de faire réduire leurs tarifs de 30 à 40% sans réduire la qualité, sauf à diminuer la prestation visuelle. Il existe bien une offre low cost, mais elle est vendue sans prestation de santé visuelle. Certes, cette prestation de santé visuelle pèse de façon importante sur le prix final, mais elle représente une composante fondamentale du bien voir", estiment-ils.
"Vouloir rembourser des lunettes intégralement (100 %) est dangereux pour le bien voir"
"L'optique est au carrefour de la santé et de la mode : il n’incombe ni à l'Assurance Maladie ni aux complémentaires de rembourser l'esthétique ... et surtout ne pas porter atteinte à la santé visuelle du porteur, soulignent Stéphanie Dangre et Jérôme Schertz. Le reste à charge représente la liberté du consommateur, qui doit pouvoir choisir le style de ses lunettes et les options de ses verres. En général, il est plutôt un investissement dit de "consommation" que de santé visuelle".
"Le coût d’un remboursement à 100% serait abyssal pour la collectivité et surtout inutile, puisqu’il concernerait uniquement du confort et de la mode, continuent-ils. Quant à sa prise en charge par les assureurs privés, elle se retranscrirait automatiquement dans les cotisations des consommateurs. Cela implique pour le marché de généraliser à terme des offres low-cost sans prestation visuelle".
Quelles solutions pour les Français ?
Pour la centrale, 4 solutions s'imposent :
- Laisser librement s'exprimer la concurrence : permettre au consommateur de choisir sa prestation et son opticien.
- Imposer à tous les opticiens professionnels de santé une offre sans reste à charge, avec au minimum 50 montures. Les personnes les moins aisées doivent aussi pouvoir choisir librement leur équipement - basé sur les minima des contrats responsables et solidaires - chez tous les opticiens !
- Reconnaître la valeur de la prestation santé visuelle et améliorer sa prise en charge par l’Assurance maladie.
- Simplifier la compréhension des remboursements pour le public par une communication lisible et loyale, favorisant l’information et la transparence.
"La ministre de la Santé aura à trancher. Elle ne pourra faire l’économie d’une réforme du remboursement des soins et de l’optique. Un enjeu majeur pour nos compatriotes qui portent des lunettes, et plus généralement pour toute la filière optique qui emploie près de 50 000 personnes en France", concluent Stéphanie Dangre et Jérôme Schertz, se tenant à disposition "pour construire la nouvelle politique de santé visuelle dans l’intérêt de tous".
Pluriel de minimum.
Les minima sociaux.
Du latin minima, pluriel de minimum ; il s’agit, là encore d’un archaïsme latin, très vivant cependant, remplacé par le pluriel français minimums.