Et si les opticiens et les orthoptistes se plaçaient en premier recours de la santé oculaire ? Dans un courrier envoyé aux adhérents du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof), qu’Acuité s’est procuré, son président le Dr. Thierry Bour appelle ses confrères à participer à la manifestation du 15 mars prochain. Pour quelles raisons ? « Il y a le problème général de la loi Santé de Marisol Touraine, que tout le monde commence à bien connaître, mais depuis quelques jours il s’y ajoute une problématique particulière à l’Ophtalmologie », souligne-t-il.
En effet, comme nous vous en parlions ce matin, une mission Igas a été nommée afin de faire des propositions pour le plan de santé oculaire à la suite de l’évincement des professions de santé de la loi Macron. Et les auditions ont commencé : « Dans ce cadre, le ministère de la Santé fait des propositions encore jamais vues et qui seraient incorporées dans la loi Touraine pour entrer dans ce qu’il appelle les ‘pratiques avancées’ », assure le Dr. Thierry Bour.
Les opticiens et les orthoptistes en première ligne ?
Quelles seraient alors ces propositions ? Au grand désarroi des ophtalmologistes, le passage de la durée de validité de l’ordonnance à 5 ans pourrait resurgir et les opticiens se verraient confier l’apprentissage des lentilles de contact. « Pour les orthoptistes, c’est encore pire », écrit le Snof en expliquant qu’ils pourraient réaliser « des actes d’orthoptie en dehors des cabinets d’ophtalmologie sans prescription médicale » et obtiendraient « l’autorisation de prescrire des dispositifs médicaux et enfin l’adaptation des prescriptions de lunettes dans le cadre d’un renouvellement pendant 5 ans ! ». « L’objectif étant d’autonomiser les orthoptistes en dehors des cabinets d’ophtalmologie et qu’ils s’occupent du premier recours ! », s’insurge le président du syndicat des ophtalmologistes.
Nouveau rapport de force avec le ministère et les orthoptistes
« Nous sommes partis dans un rapport de force. Une fois de plus, notre spécialité est en première ligne des attaques ! », continue le Dr. Thierry Bour dans son courrier en affirmant que « Bercy reste à l’affût pour réintroduire les optométristes si l’occasion se présente ». C’est pourquoi, selon lui, « il faut que les ophtalmologistes apparaissent clairement dans le cortège ! ».
Mais la bataille ne se jouera pas seulement dans les rues de Paris, dimanche 15 mars. D'ores et déjà sur Twitter, ophtalmologistes et orthoptistes se font face : « Un vent nouveau pour ma profession et mes collègues orthoptistes ? », interroge Laura St. Amour sur le réseau social. « Aujourd'hui les orthoptistes libéraux NE peuvent PAS être en premier recours », répond le Dr. Jean-Bernard Rottier, ancien président du Snof. « Pas besoin d'être surveillés ! Nous référerons toujours. La lettre anti-libérale de T. Bour, on en parle ouvertement ? », tacle de son côté Laurent Milstayn, président du Snao (Syndicat national autonome des orthoptistes). « Nous avons toujours dit la même chose : unité de lieu et sécurité pour le patient », renchérit le Dr. Thierry Bour.
Notons toutefois que, la mission confiée à l’Igas n’en est qu’à son début. Il faut rester prudent sur les suppositions et les soi-disantes propositions que le ministère de la Santé pourrait ou non amener devant les parlementaires. En tout cas, il est certain que Marisol Touraine a des tas de projets pour notre filière et elle ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Les opticiens pourraient alors être reconnus comme de véritables professionnels de santé et ces évolutions seraient sans doute efficaces pour pallier aux dérives entraînées par des délais d’attente à rallonge. Affaire à suivre...