Arrivé à la tête d’Essilor France en septembre 2017, Alexandre Montague prend pour la première fois la parole dans la presse. Fort de ses 10 ans d’expérience dans l’industrie optique et ophtalmologique dont 6 ans passés au sein du Groupe Essilor, il s’est pendant longtemps concentré au développement des marchés émergents (Asie, Moyen-Orient et Afrique). Il confie aujourd’hui sa vision du marché français à acuite.fr.
Acuité : Après toutes ces années à l’international, quelle est votre vision du marché français ?
Alexandre Montague : La France est un marché passionnant, avec une filière optique d’excellence et structurée. Même s’il est mature, il reste encore beaucoup à faire. Certains besoins n’ont toujours pas de réponses, par exemple nous pouvons améliorer encore le taux d’équipement en progressifs des presbytes, ainsi que travailler sur la prévention et la sensibilisation de la population à l’importance de la santé visuelle. Nous devons également tous promouvoir le rôle central de l’opticien au cœur de la filière pour faire connaître et reconnaître son expertise et lutter contre les idées reçues qui circulent dans la presse grand public.
A. : Est-ce votre façon de répondre à l’UFC-Que Choisir ?
A.M. : Toutes les attaques médiatiques confortent l’idée qu’il y a un important travail de sensibilisation à faire pour aider nos concitoyens à mieux comprendre le métier d’opticien mais aussi le nôtre. Nous n’avons rien contre un comparateur de devis, mais il n’est pas possible de réduire l’équipement optique à son prix affiché ou remboursé. Qu’en est-il de la logique de l’opticien professionnel de santé qui se trouve derrière ? S’il y a des éléments sur lesquels nous sommes attaqués, c’est qu’il y a encore du travail à faire pour convaincre le consommateur que notre filière est synonyme d’excellence.
A. : Quelle est votre stratégie pour cette année ?
A.M. : Essilor a décidé d’impliquer davantage le porteur dans l’acte d’achat, notamment au niveau du verre. Nous voulons leur prouver qu’un bon équipement peut leur changer la vie.
Cela a commencé avec la mise en ligne récente de notre nouveau site grand public labonnevue.fr. Il se donne pour objectif de devenir le site référent en matière de santé visuelle. Dans les prochains mois, il évoluera pour aider à fluidifier l’accès aux professionnels de santé, avec un service en ligne de prise de rendez-vous qui permettra par exemple de réduire le nombre de rendez-vous non-honorés. Bien évidemment, le site propose déjà un outil de géolocalisation des opticiens qui joue un rôle essentiel dans le recrutement des consommateurs.
Deuxième axe de travail : faire évoluer l’expérience en magasin et valoriser le rôle de professionnel de santé des opticiens. Plusieurs outils seront lancés au cours de l’année pour repenser le parcours du consommateur. Nous allons ainsi révolutionner la réfraction, mais aussi développer des solutions pour renforcer l’analyse des besoins, par exemple pour mesurer la sensibilité à la lumière extérieure ou la lumière bleue. Montrer la valeur de la prestation de l'opticien va d’ailleurs de pair avec les évolutions législatives de ces derniers mois, comme le devis normalisé.
A. : Concrètement en termes de produits, quelles seront les nouveautés ?
A.M. : Entre 1992 et 2012, la quantité de lumière artificielle, phénomène connu sous le thème de « pollution lumineuse », a crû de 94% en France. Il est donc nécessaire de faire évoluer notre traitement Crizal pour réduire les reflets et avoir une meilleure qualité de vision tout en maximisant le confort du porteur. Le lancement aura lieu en avril.
Côté réfraction, rien n’a changé depuis 90 ans ! Lors du prochain congrès de la SFO (Société Française d’Ophtalmologie, NDLR), Essilor présentera un nouvel outil pour réaliser une réfraction plus précise, avec des résultats fiables au centième de dioptrie. Il va également changer la façon de faire varier les puissances grâce à une mesure en continu.
A. : Vous semblez plutôt confiant pour 2018.
A.M. : Oui, nous le sommes ! Après une année 2017 difficile, impactée par la limitation du renouvellement des équipements et la pression tarifaire des réseaux de soins, 2018 a plutôt bien démarré ! Nous bénéficions d’une stratégie solide qui consiste à sensibiliser la population pour qu’elle soit plus à même d’acheter des produits de santé visuelle et faire croître le marché dans sa totalité en augmentant les opportunités pour chacun.
Le modèle d’Essilor fonctionne ! En effet, nos opticiens partenaires font la différence par rapport aux non-partenaires : leur chiffre d’affaires enregistre sur 9 ans un écart de croissance de 20 points. Cela valide notre vision et nos convictions.
A. : 2018 verra-t-elle aussi se finaliser le rapprochement Essilor-Luxottica ?
A.M. : Cela avance toujours dans la bonne direction. Nous attendons les dernières autorisations et le rapprochement devrait se finaliser au cours du 1er semestre.
Nos clients y voient globalement une opportunité et une manière de réinventer le métier. C’est vrai que ce projet permet de sensibiliser l’ensemble des acteurs et les autorités des différents pays aux enjeux de la santé visuelle. On l’a vu depuis cette annonce, en janvier 2017, on n’a jamais autant parlé de la vision et de l’optique.
Il suffisait de les envoyer bouler ; de leur dire que vos clients, ce ne sont pas eux mais NOUS...
Il y en marre de cette langue de bois !