Le 22 décembre dernier, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi Lefebvre, notamment ses articles 5 bis et 6 relatifs à la délivrance de produits d'optique-lunetterie. Ces dispositions prévoient entre autres d'encadrer la vente de lunettes et de lentilles sur Internet, en imposant aux « e-opticiens » les obligations suivantes : la vérification d'une ordonnance en cours de validité ; une prise de mesure « réalisée dans des conditions définies par décret » pour la délivrance des verres progressifs ou des verres correcteurs « de puissance significative » ; la « mise à disposition » d'un opticien-lunetier pour toute demande d'information ou de conseil ; un délai de rétractation au moins égal à 7 jours (sauf pour les boîtes de lentilles qui auraient été « descellées par le consommateur après la livraison ») ; l'interdiction de colporter des verres correcteurs et des lentilles de contact.
Non-protectrices pour la Fnof, globalement satisfaisantes pour le SynOpe
Les syndicats d'opticiens sont divisés sur ces mesures. La Fnof (Fédération nationale des opticiens de France) les jugent bien trop insuffisantes. Pour son président Alain Gerbel, « elles ne protègent en rien les opticiens. Le projet de loi interdit le colportage, mais il faudrait rajouter l'interdiction du démarchage, comme par exemple la sollicitation des clients par e-mailings. Quant au délai de rétractation, sa mise en oeuvre risque d'être compliquée : qui sera remboursé ? Le client ? La complémentaire santé qui aura déjà procédé à la prise en charge ? », s'interroge-t-il. Du côté du SynOpe (Syndicat des opticiens sous enseigne), on estime en revanche que ces mesures sont « globalement satisfaisantes » : « bien sûr, il serait préférable d'imposer davantage de restriction à la vente en ligne, mais on est obligé de constater qu'elle se développe. En revanche, nous pensons qu'aucune prise de mesure à distance n'est fiable et nous allons défendre l'idée qu'elles doivent être faites en magasin », explique son président Christian Roméas, dans la perspective du retour du texte à l'Assemblée nationale. Philippe Verplaetse, président de l'AOF (Association des optométristes de France) plaide lui aussi en faveur d'un contact direct entre l'opticien et son client, « sans lequel aucun acte technique ou professionnel ne peut être bien fait », en estimant que le projet de loi voté par le Sénat est « très positif ». Enfin, l'UDO (Union des Opticiens) réaffirme à ce sujet "avoir été auditionnée par la commission de l'Economie du Sénat", et "constaté que certaines de ses propositions ont été retenues". "Notre organisation a été la première à reconnaître ce mode de distribution, dont le développement est inéluctable. Aujourd'hui, faut-il favoriser les sites étrangers, qui échappent à tout contrôle, au détriment des sites français qui sont agréés par la Sécurité sociale ? Il existe des prises de mesures à distance fiables, même si toutes ne le sont pas. Et, à ce propos, quid du contenu du décret ?", souligne Henri-Pierre Saulnier, président du syndicat.
Rappelons que le projet de loi Lefebvre doit encore être examiné, en deuxième lecture, par l'Assemblée nationale (vraisemblablement d'ici la fin février). Les députés pourront donc encore modifier ses dispositions et, en cas de désaccord avec le Sénat, auront le dernier mot.
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