Elie Aboud, député de l'Hérault (et médecin cardiologue), milite auprès des parlementaires en faveur de la reconnaissance de l'optométrie en France. L'auteur de la première proposition de loi en ce sens a présenté ce matin, devant d'autres députés et sénateurs, les résultats de l'étude menée par le Pr. Jürgen Wasem (Université de Duisburg-Essen), qui établit que « les opticiens-optométristes sont une alternative sûre et économique comme prestataires de soins oculaires de première intention ». Cette enquête, commandée par l'ECOO (Conseil européen d'optométrie et d'optique), compare les systèmes français, allemand et britannique. Elle montre notamment qu'outre-Rhin, 73% des ordonnances d'aides visuelles sont réalisées par des opticiens-optométristes, « sans risque plus élevé pour la santé publique ». L'étude relève aussi que la formation d'un opticien-optométriste « coûte jusqu'à trois fois moins cher » que celle d'un ophtalmologiste.
« Les ophtalmologistes ne pourront plus ignorer l'optométrie »
Forte de ces résultats, l'UDO (Union des opticiens, qui représente la France à l'ECOO) regrette que seules la France et la Croatie refusent encore de recourir aux opticiens-optométristes. Son président Henri-P. Saulnier assure que « leur formation (master) est adaptée ». « Il n'est pas question d'enlever leurs prérogatives aux ophtalmologistes mais de travailler en complémentarité avec eux ». Aux yeux du syndicat, la délégation de tâches aux orthoptistes, souhaitée par les ophtalmologistes, n'est pas pertinente : « les orthoptistes travaillent sur prescription, donc les déserts médicaux persisteront ». « La pratique de l'optométrie correctement encadrée peut répondre avec efficacité et célérité au grave problème de santé publique qui se posera, compte tenu de la baisse du nombre d'ophtalmologistes et du vieillissement de la population », ajoute Jean-François Marinacce, délégué pour l'UDO à l'ECOO. Quant à Elie Aboud, il se dit convaincu que « les ophtalmologistes ne pourront pas ignorer l'optométrie ».
Ouverture vers un dialogue
Selon Dominique Orléac, députée du Lot et ophtalmologiste, une telle évolution serait cependant une « formule risquée » et n'aurait pas forcément les résultats escomptés : « 50% des ordonnances de lunettes sont émises à l'occasion d'un suivi médical, l'optométrie ne soulagerait donc pas les salles d'attente de 37% », comme l'estime l'UDO. Pour l'élue, la formation des optométristes est « incomplète car elle ne comporte pas les indispensables stages hospitaliers ». D'autres parlementaires, notamment Marie-Christine Dalloz (députée du Jura), plaident à l'inverse en faveur d'une « passerelle » entre optométristes et ophtalmologistes, et surtout pour l'instauration d'un dialogue entre les acteurs de la filière. Ce travail collectif est souhaité également par l'UDO et Elie Aboud qui « ne veulent pas passer en force ni s'opposer aux ophtalmologistes ».
Voir aussi nos débats :
Studio TV Acuité Silmo 2011 : Des « super-opticiens masterisés » pour pallier le manque d'ophtalmo ? L'émission et sa synthèse
Studio TV Acuité Silmo 2009 (avec Elie Aboud) : L'optométrie en débat